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Du 16 mars au 12 juin 2017, Dessiner le quotidien, la Hollande au Siècle d’or s’expose dans la rotonde Sully au musée du Louvre. Portée par Emmanuelle Brugerolles et Olivia Savatier Sjöholm, respectivement conservatrices en charge des dessins aux Beaux-Arts et au Département des arts graphiques du musée du Louvre, elle met à l’honneur les motifs de la vie quotidienne en Hollande au XVIIème siècle, à travers les dessins de peintres néerlandais tels que Rembrandt, Jan van Goyen, Cornelis Visscher ou encore Adriaen van Ostade.

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Faisant écho aux œuvres de Vermeer et les maîtres de la peinture de genre présentées au Louvre jusqu’au 22 mai 2017, l’exposition révèle dans toute leur diversité les sujets nourrissant la peinture de genre hollandaise au XVIIème siècle. La constante captation du réel y apparait comme le fondement de l’art de ces peintres, aujourd’hui conservés dans les plus grandes collections mondiales. Du portrait d’intérieur au travail des champs en passant par les auberges et le monde militaire, l’exposition souligne la complexitéde la démarche de ces artistes saisissant les scènes qui les entourent sous des traits étonnamment légers et fugaces. Ils offrent ainsi à voir un quotidien pittoresque, parfois intimiste, tous partageant la même volonté de représenter dans leurs œuvres des scènes certes construites et réfléchies, mais toujours témoins de leur temps.

Monde urbain et monde rural

L’exposition s’articule autour de deux axes, le monde urbain et le monde rural, qui abordent sept thématiques: Travail et vie domestique, Divertissements et Le monde militaire pour le premier, Le monde rural au travail, Marginaux et indigents, Vie domestique et Scènes d’auberge pour le second.  À travers des œuvres telles que Femme à la fenêtre, Rembrandt apparaît comme héraut des représentations de la vie domestique. La sphère publique et la sphère intime s’y confrontent dans des compositions codifiées autour des rôles tenus au sein du foyer par le chef de famille et son épouse. Quant à la vie domestique rurale, c’est notamment Adriaen van Ostade qui célèbre l’existence simple et vertueuse du paysan, avec des esquisses comme  Joueur de cornemuse devant une auberge. Il met ainsi en exergue les valeurs de simplicité, de travail et de vie familiale prônées par cette peinture de genre hollandaise du XVIIème siècle. Toutefois, cette production se construit sur une image idéalisée du paysan menant une vie certes travailleuse, mais aussi insouciante et joyeuse, partagée entre labeur, foyer et loisirs.

Des divertissements de la bourgeoisie citadine à la vie militaire, en passant par des scènes d’auberge pittoresques, le visiteur découvre des visages croqués sur le vif ou de mémoire, des vues tantôt légères, tantôt graves, mais toujours selon un regard distancié, témoin d’événements intimes ou théâtraux. Ces dessins apparaissent alors comme le premier jalon d’une démarche visant la mise en scène, dans de grandes compositions, des archétypes de la vie quotidienne hollandaise tirés de l’observation de l’entourage des peintres.

Ces dessins apparaissent alors comme le premier jalon d’une démarche visant la mise en scène, dans de grandes compositions, des archétypes de la vie quotidienne hollandaise tirés de l’observation de l’entourage des peintres.

Si les panneaux informatifs proposent un rapide aperçu de chaque thème qui satisfera les néophytes, l’amateur préférera se tourner vers le catalogue proposé en marge de l’exposition afin d’étoffer ses connaissances sur le sujet. Du reste, on peut regretter que les formats, de dimensions modestes et alignés les uns à la suite des autres, obligent le visiteur à se masser devant les œuvres, créant, en cas de forte fréquentation, un parcours linéaire et statique. Cette approche segmentée du corpus exposé le prive d’une vision d’ensemble de cette production tout à fait singulière. Par ailleurs, les différents encadrements, tantôt marrons, tantôt noirs, dégagent un sentiment d’inachevé et de manque de finesse dans la scénographie, préjudiciable à une institution telle que le musée du Louvre. Cependant, le choix d’associer certaines esquisses à des peintures exploitant les mêmes motifs, permet d’illustrer opportunément l’artifice des peintres qui croquent leur quotidien afin de recomposer, dans une œuvre finale, une certaine vision de leur temps.

Dessiner le quotidien, la Hollande au Siècle d’or offre une clé de lecture de la peinture de genre bien peu mise en œuvre dans les expositions grand public. Ces esquisses créent en outre une proximité intime et furtive avec leurs auteurs, révélant leur rapport au monde. À travers des traits fugaces ou fermes, abrupts ou tendres, ces dessins racontent une vision sincère, sinon authentique, d’une époque complexe, codifiée et hiérarchisée.

Clara Féjean