Les duos d’écrivains ne sont pas si nombreux en littérature : les frères Grimm, les Goncourt, les Tharaud, les Rosny ou bien encore Erckmann et Chatrian, Boileau et Narcéjac etc; sont quelques exemples, auxquels sont venus s’ajouter Yves et Ada Rémy, cas peu fréquent (peut-être le seul ?) de couple à la ville comme en littérature. Yves et Ada (et non Ada et Yves, ils y tiennent), dont les débuts remontent à mai 68 (!), ont peu écrit : cinq romans et recueils de nouvelles, une pièce radiophonique, d’autres nouvelles non encore publiées pour une grande part puis se sont consacrés à leur carrière de cinéastes. Ils se sont pourtant imposés dès leur premier livre, Les Soldats de la Mer, comme des maîtres du courant fantastique français, dans la tradition du romantisme du XIXème siècle, avant que le courant de la fantasy, inspiré par J.R.R. Tolkien, Terry Pratchett et Michael Moorcock dans le monde anglo-saxon, Jacques Goimard puis Pierre Bottero en France, ne devienne à la mode. Le recueil de nouvelles intitulé Les Soldats de la Mer s’est à ce titre révélé comme un chef-d’oeuvre du genre et a connu pas moins de cinq rééditions : trois cités d’un monde parallèle rappelant furieusement la Prusse sous l’époque napoléonienne décident de former une fédération et partent à la conquête des territoires voisins. Les soldats de la fédération deviendront bien vite la proie de phénomènes étranges et surnaturels. Zone Critique est partie à la rencontre de ces deux auteurs capitaux et pourtant si injustement méconnus, à l’occasion de la réédition d’un de leurs ouvrages, le Grand Midi, aux éditions du Visage Vert.

I Le Grand Midi

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Résumé du Grand Midi : Gregor Kopfmann, bateleur pour un cabaret interlope, est invité par le mystérieux colonel Lethal à trouver du travail pour le compte d’une compagnie énigmatique, l’El, située dans un pays étrange, gris et hors du temps où les habitants ne semblent plus être que les ombres d’eux-mêmes. Lors de ses divers entretiens d’embauche, Gregor sera conduit à faire le récit de sa vie, marquée par la guerre, la mort, la destruction mais aussi l’initiation aux plaisirs furtifs de la chair ainsi qu’à l’amour.

Le Grand Midi vient d’être réédité, près de cinquante ans après sa publication (en 1971 par Christian Bourgois), aux éditions du Visage Vert. Etrangement, c’était le seul de vos ouvrages à ne pas avoir été réédité, alors que votre premier livre, Les Soldats de la Mer, par exemple l’a été à de multiples reprises. Comment expliquez-vous cet apparent désintérêt des éditeurs pour cet ouvrage ?

Ada REMY : C’est d’autant plus étonnant que j’ai récemment retrouvé une lettre de Christian Bourgois disant qu’il était très heureux de l’éditer ; il avait ajouté : « c’est le livre que j’attendais de vous ». Il n’a pourtant pas eu beaucoup de succès, et s’est assez mal vendu, contrairement aux Soldats.

Comme la littérature ne nous suffisait pas pour vivre et que nous avions des obligations familiales, nous nous sommes consacrés à notre carrière de co-réalisateurs de courts-métrages. Nous avons donc mis temporairement de côté la littérature et nous ne nous sommes plus investis dans la publication de nos romans et la recherche d’éditeurs. Notre métier et les voyages lointains qu’ils occasionnaient ont accaparé la majeure partie de notre temps.

Nous avons, du coup, été un peu oubliés. Encore que Les Soldats de la Mer continuaient leur carrière en étant réédités chez Seghers, puis chez Press Pocket et au Fleuve Noir (La maison du cygne, quant à elle, qui était publiée chez Robert Laffont en 78, était rééditée chez Press Pocket). Il y avait aussi la revue Fictions dans laquelle Daniel Riché avait publié de longues nouvelles de nous.

Yves REMY : Ensuite, la retraite est venue et Xavier Vernet, des éditions Dystopia, nous a contactés et remis dans le bain. Il a commencé par rééditer Les Soldats de la Mer (ce fut la cinquième édition de ce livre, par cinq éditeurs différents ; la première datant de 1968 chez Julliard). Puis il édita deux inédits : Le prophète et le vizir et, en 2015, LeMont 84, d’après un manuscrit que nous avions laissé croupir dans les années 70, et, enfin, en 2018 La maison du cygne.
En revanche, Dystopia a refusé Le Grand Midi. Un des membres du comité de lecture avait jugé que le héros du roman était un obsédé sexuel ! La dualité Eros-Thanatos ne l’avait pas séduit… C’est donc le Visage Vert qui s’en est chargé, édition qui est d’ailleurs distribuée par Dystopia.

A quelles corrections avez-vous procédé pour la réédition du Grand Midi ?

AR : Chaque fois que nous avons eu à reprendre un de nos textes, nous nous sommes efforcés de le parfaire, si possible. Il y a toujours des corrections à faire ou des erreurs à rattraper !

Contexte général

L’action du Grand Midi se déroule en trois temps : la fin de vie du personnage principal (Gregor Kopfmann), son passage dans l’au-delà (où la compagnie El règne sans partage) et enfin, un voyage spirituel sur l’autre rive, qui représente probablement les Enfers. Ces trois parties pourraient faire l’objet chacune d’une nouvelle. Le Grand Midi a-t-il été conçu dès le départ comme un roman linéaire ou avez-vous assemblé plusieurs histoires dans l’histoire, comme pour les Soldats ?

Il faut d’abord prendre en compte le fait que nous avons, dans le cadre de notre collaboration, un problème vis-à-vis de nos personnages. Nous travaillons surtout sur des personnages qui ont une autonomie. Ils ne sont pas du tout une évocation de notre propre mental, ce n’est pas le reflet de nous-mêmes.

YR : Il faut d’abord prendre en compte le fait que nous avons, dans le cadre de notre collaboration, un problème vis-à-vis de nos personnages. Nous travaillons surtout sur des personnages qui ont une autonomie. Ils ne sont pas du tout une évocation de notre propre mental, ce n’est pas le reflet de nous-mêmes. Nous les avons façonnés, comme ceux des Soldats, par exemple, à partir de références issues de livres anciens ou d’images de films, sans que nous sachions ce qu’ils allaient faire ni comment ils allaient évoluer. Il en fut ainsi pour l’enfant Gregor qui semblait traumatisé par ces images de guerre que nous projetions devant ses yeux. Il était un survivant, caché dans les ruines de la ferme familiale, dans le décor même où, l’année passée, il s’adonnait à des jeux de touche-pipi avec sa cousine, une perverse petite initiatrice. Cette association guerre et sexe avait marqué notre personnage. Quelque temps plus tard, nous avons confronté notre héros à un nouvel épisode de guerre. Il nous sembla que c’était lui qui nous réclamait une nouvelle relation amoureuse ! Nous obéissions. Les épisodes de guerre devenaient de plus en plus violents et ses partenaires féminines évoluaient selon ses propres goûts. Notre personnage nous échappait. Il y avait entre lui et nous une sorte de distanciation.

Le Grand Midi est sans doute votre livre le plus noir, le plus mélancolique et funèbre, où la Mort rôde et est omniprésente : Gregor se remémore les malheurs de sa vie, la ville de l’El est froide, austère, morne. Peu de joie et de lumière dans cet univers désespéré. Ce côté très sombre vient donc de circonstances personnelles ?

AD : Oui. Ma grand-mère, qui m’avait élevée, venait de mourir et ma mère m’avait conseillé de lire le Livre des Morts Tibétains. Et Gregor se retrouve dans le Bardo bouddhiste davantage que dans le purgatoire chrétien.

Vous avez également développé un intérêt certain pour les questions de métempsychose, de palingénésie. Cela se symbolise ici par la traversée en barque d’un nouveau Styx, conduite par un nautonier aveugle qui fait penser à Charon.

YR : Cela vient de nos influences littéraires. Nous nous sommes connus dans une école de cinéma, qui s’appelait à l’époque l’IDHEC (ancêtre de la Femis). Ada venait de Perpignan, moi des Vosges, nous étions radicalement différents, sans aucune référence littéraire commune, en dehors des classiques de culture générale. Jean-Louis Bory, qui était notre professeur de théâtre, et d’autres nous ont orientés vers le surréalisme, qui conduit facilement au fantastique. Par ailleurs, c’est à ce moment-là que nous avons lu Borges et découvert ses nouvelles fantastiques voire utopiques. On a adoré ses artifices, ses impostures et, par-dessus tout, son style. On a donc commencé à travailler ensemble et à avoir les mêmes idées, dont notamment les centres d’intérêt communs que vous avez évoqués.

La métaphysique, la religion, le mythe

C’est également votre ouvrage le plus métaphysique, dans lequel le héros Gregor et sa fiancée Blue Devil partent in fine à la découverte de la connaissance de soi, dans une sorte de voyage spirituel et introspectif.

AR : Les deux personnages n’ont pas le choix. Ils ne vont rester ni dans le village en laissant Gregor tenter d’obtenir un permis d’intégrer les grands chantiers de l’El (puisque Blue Devil, la jeune femme avec qui il se lie, est bannie), ni s’exiler en Enfer. Ils sont donc forcés de poursuivre leur quête et finalement tenter de s’échapper, sans savoir que la voie qu’ils choisissent de prendre est contrôlée en secret par l’El, ce qu’ils ne découvriront, comme les lecteurs, qu’à la toute fin du roman.

Les héros connaissent néanmoins une note d’espoir à la fin, avec la découverte du Paradis, ou de l’Elysée, ce que pourrait signifier l’El. L’ouvrage n’est donc pas totalement tragique. Faut-il y voir une dimension religieuse et comprendre qu’une rédemption est toujours possible si l’on a la foi ?

YR : C’est une rédemption complète, ils redeviennent presque humains, un couple originel tel Adam et Eve. C’est à la fin du roman qu’il est écrit : « Avant que le soir ne tombe, nous avons trouvé des touffes de lichen. Nous revenons à la vie. Et le Seigneur nous a rendu le vent, un vent doux et nouveau, un vent sans plaintes et sans sursauts ; nous y devinons un parfum de verts pâturages ou de mer nouvelle et fécondée. »
C’est donc tout le contraire de ce qu’ils croient être l’El, un monde qui nie l’humanité, où tout est artificiel, le règne de la technologie contre le naturel, la vie et la fécondité…

Le titre est d’ailleurs tiré du Zarathoustra de Nietzsche. « Et ce sera le grand midi, quand l’homme sera au milieu de sa route entre la bête et le Surhomme, quand il fêtera, comme sa plus haute espérance, son chemin qui mène à un nouveau matin. »

AR : Tout à fait. J’ai retrouvé récemment des notes que nous avions prises sur le Zarathoustra, notamment cette très belle phrase : « Et ceux à qui vous n’apprendrez pas à voler, apprenez-leur à tomber plus vite ». Nous avions aussi des notes sur les façons de se débarrasser de son enveloppe corporelle, sur la conquête spatiale etc.

On y décèle même des passages assez poétiques sur la mort, comme cette citation en fin de première partie : « Je fus le premier puni de ma profanation : j’eus tout d’un coup l’impression d’avoir été l’amant d’une maîtresse de fange. Je m’enfuis. La ville était vieille et usée, noire. Je m’arrêtai sur un pont. En bas soufflait un fleuve, comme un gouffre sans fin et invisible. Maintenant vient le moment où la terre sombre dans l’eau. J’y jetai mon talpack et mon dolman. L’inconnu absorba la livrée du désespoir et toute chance de revenir un jour à Kaminski. Alors, pourquoi pleurai-je ? »

AR : Il y a plusieurs passages comme cela, mis en italique dans le livre, notamment sur le feu, l’eau et les autres éléments, qui sont en fait extraits du Livre des Morts des Anciens Egyptiens.

YR : Il y a également une référence à saint Jean Baptiste, dont le mythe du baptême ouvre la voie rédemptrice de Dieu. Toujours cette dimension religieuse qui revient.

AR : Yves est un athée pur et dur mais il a été élevé à Saint-Joseph d’Epinal, cela laisse des traces.

YR : C’était un ancien collège jésuite qui avait été sécularisé en 1905, et était passé sous l’autorité des prêtres du diocèse qui avaient, encore de mon temps, le souci de maintenir une sorte d’allégeance de l’institution Saint-Joseph à la Compagnie de Jésus. Le mot « allégeance » est trop fort, disons qu’ils entretenaient une vision commune des choses, dans le domaine de l’éducation des jeunes gens.

La troisième partie du Grand Midi, dont chaque paragraphe est numéroté comme dans les Evangiles, semble être une prière, une incantation, par exemple : « Alors, Seigneur, apparaissent à l’horizon Tes dangereuses hallucinations ; celles de Tes caravanes de mulets, par exemple, qui nous fuient perpétuellement. Je demande la force de défaire Tes mirages, Seigneur. Mais que le désert est grand ! Comment Tes songes peuvent-ils encore le peupler ? Alors apparaissent Tes pâtisseries de rêves, Tes étals, Tes rayons de miel qui fondent dans nos larmes […] »

YR : C’est la logorrhée classique.

AR : Oui mais c’est beau (rires).

On peut y voir une correspondance avec la Maison du Cygne (1). En effet, LeGrand Midi serait le combat incessant de l’homme entre l’ambition de l’infiniment grand (avec sa volonté de conquête, sa soif inextinguible de connaissance) et sa nécessaire quête d’identité individuelle. Ce sont peut-être les prémices du combat entre la maison du Cygne et celle de l’Aigle, entre l’épanouissement de l’individu et la prédominance des volontés de la communauté.

AR : C’est effectivement un thème que nous traitons fréquemment, mais il ne nous est pas original. D’ailleurs, on peut le voir traité différemment dans Le Mont 84 (2).

L’amour, la femme

C’est aussi la première œuvre où la figure de la femme, assez secondaire en général dans vos ouvrages, joue un rôle prépondérant. On y croise plusieurs figures : la femme-enfant, l’initiatrice, la tentatrice, la prostituée, enfin la rebelle émancipée (Blue Devil), figure de la femme libérée.

YR : Blue Devil, la camarade de Gregor, n’a pas de vision particulière sur son avenir. Ce qu’elle veut, c’est s’échapper de cette ville et elle choisit l’homme dont elle devine qu’elle pourra l’aider à trouver une issue à cette fuite. Je ne crois pas qu’elle rêve d’un autre avenir. Elle a mis la main sur ce personnage qu’elle trouve intéressant et elle ne veut pas le lâcher.

AR : Elle sait néanmoins qu’elle peut s’appuyer sur lui, elle le comprend assez vite. C’est un rôle de femme de premier plan.

YR : Il est vrai que dans Les Soldats de la Mer par exemple, les femmes ne sont pas les bienvenues. Et quand elles apparaissent, il s’agit de déesses, de naïades.

AR : Ni dans Le Mont 84, où le personnage d’Almérika, l’amoureuse d’un des trois fugitifs, est sans grande profondeur mais s’efforce de confirmer son amoureux dans la voie qu’il s’est choisie.

C’est sous l’influence d’ailleurs de Blue Devil que Gregor se transforme lui-même en un marginal, un inadapté, ce qui le poussera à la révolte et à la recherche de sa destinée.

AR : Oui, c’est lui qui la suit. Sans elle, il ne traverserait pas les Enfers. Il est plus apathique, plus lâche, plus falot, alors que Blue Devil est un personnage volontaire qui fait avancer l’action.

YR : Elle ne sait pas vers quoi.

L’aspect politique et correspondance avec les autres ouvrages

L’El, telle qu’elle est décrite, est la négation de la vie en société et de la vie tout court. Il s’agit d’un système excluant, régi en castes. Vous avez d’ailleurs souvent décrit des systèmes politiques autoritaires : fédération impérialiste dans les Soldats, régime policier de surveillance généralisée dans le Mont 84, sorte de théocratie dans la Maison du Cygne, dans la lignée des grandes dystopies de Zamiatine, Huxley etc.

AR : Je ne connais pas Zamiatine, je vais me renseigner. Pour des auteurs du genre fantastique, c’est impardonnable (rires). Il faut dire qu’on n’alimente plus notre bibliothèque en nouveautés fantastiques ou de science-fiction, on a curieusement arrêté. Mais effectivement, on aborde ces questions de manière parfois plus ou moins directe. C’est sans doute plus prégnant dans le Mont 84, où l’on aborde même l’apocalypse, déjà frôlée dans les Soldats et qui est l’aboutissement presque naturel de tout système totalitaire. Ce chaos final apporte une conclusion (mais peut-être pas définitive ?) à l’univers de la Fédération.

Le Grand Midi entretient une certaine continuité avec les Soldats, dans le sens où l’action se déroule à une époque indéterminée, dans une sorte de Mitteleuropa, où la guerre et la mort sont omniprésentes. La correspondance est-elle volontaire ici ?

AR : Yves a été très influencé par la guerre, depuis son enfance. C’est lui qui revient toujours sur ce sujet. Cela lui vient certainement de son expérience de la guerre et de l’occupation, quand il se cachait avec sa famille dans la cave de leur domicile vosgien pendant l’hiver 44-45. Pour ma part, même si je suis née pendant la guerre aussi, je n’en ai pas particulièrement souffert, à Perpignan.

YR : L’Allemagne et l’apprentissage de l’allemand (dans les contes populaires de Grimm comme le Joueur de flûte de Hamelin, Der Rattenfänger von Hameln en allemand) m’ont également marqué. La culture germanique m’a pour ainsi dire vraiment imprégné.

AR : Cet aspect-là avait beaucoup plu au journal Minute, qui a écrit la toute première critique des Soldats sous la plume de Jean Bourdier et qui avait intitulé son article : « Que cette guerre est jolie ». On ne connaissait pas du tout ce journal, on n’a jamais été marqués politiquement. J’avais même appelé Bourdier pour le remercier car son article était intelligent et très beau. On était fiers ; puis tout le monde nous est tombé dessus car il s’agissait d’un journal d’extrême droite. On a même été invités dans la foulée par le GRECE, on n’avait pas osé refuser. Tout le monde, dans ce mouvement, adorait les Soldats (sans doute pour l’esthétisation de la guerre). Notre livre a, du coup, été catalogué au tout début comme une œuvre de droite, pour ne pas dire d’extrême droite.

YR : On travaillait à cette époque dans une agence de publicité et nous nous étions fait insulter par nos collègues. La semaine suivante, c’est Combat qui publiait un article élogieux sur les Soldats qui a compensé l’impression donnée par Minute (rires).

Avez-vous réalisé des films sur le sujet de la guerre, de l’armée ?

YR : Oui, beaucoup. On présentait nos films à la société de production de Claude Lelouch, les Films 13. Tout ce que le cinéma d’entreprise comptait de producteurs s’y retrouvait, ainsi que les militaires de l’ECPAD (Etablissement de Communication et de Production Audiovisuelle de la Défense). Le directeur de cet établissement désirait depuis longtemps donner à ses films de présentation des différentes armes une vision plus humaine et moins machiste. Et il pensait arriver à ses fins en confiant la réalisation à une femme. Mais à cette époque, il y en avait très peu dans cette branche. En plaisantant, je disais que les seules rivales d’Ada étaient Agnès Varda et Leni Riefenstahl (rires). Moi, je n’apparaissais qu’en arrière-plan.

AR : Le directeur, qui était colonel, me commanda un film-carte de visite sur l’Armée de l’Air puis sur la Marine. Ces films remportèrent beaucoup de succès tant dans les unités qu’à l’extérieur. Ils étaient projetés par les recruteurs mais aussi pour le grand public et à la télévision. Suivirent plusieurs films sur les différents corps : les chars, les hélicos, le service de Santé. Contrairement à ce qu’on aurait pu redouter, j’étais reçue partout à bras ouverts. Jamais un militaire n’a fait d’observations sur le fait qu’une femme réalise un film sur cet univers. Hormis une fois avec le commandant du Clemenceau, car je ne lui avais pas demandé la permission de filmer en hélicoptère le décollage d’un avion (je savais qu’il ne l’aurait pas accordée), ce qui était, il faut bien l’avouer, très dangereux. Je voulais imiter le film américain Nimitz.

L’armée nous a également, à la fin de notre carrière, proposé de nous pencher sur les archives photo et cinéma accumulées par les reporters de guerre. Ce fut un travail passionnant que de trier et de sélectionner ces dizaines de milliers d’images prises par des soldats engagés sur tous les conflits. Elles furent l’objet d’une trentaine de petits films de montage mais aussi de moyens métrages distribués sur France 3.

Il y a justement un colonel dans le Grand Midi : Ernthe Lethal, sorte d’Ange de la mort, qui renvoie à plusieurs personnages des nouvelles des Soldats : le lieutenant Schaeffer, fantôme qui hante le monde des vivants et qui reprend à l’insu de tous le commandement d’une garnison dans un nouveau désert des Tartares ; le joueur de dames qui annonce le résultat d’une bataille avant qu’elle ait lieu ; le général des Fosses, qui désigne les soldats qui perdront la vie au cours des batailles

YR : Il est curieux de constater que dans nos romans où figurent souvent des militaires, ils ne se présentent pas toujours sous un jour plaisant, le fantastique se prêtant très souvent à la face obscure des choses.
Il est plus passionnant de décrire des salauds que des hommes bienveillants. A propos d’Ernte Lethal, dont nous avions construit le nom sur des mots qui en allemand évoquent « moisson » et « mort », avez-vous remarqué que ses initiales donnent EL ? Ce qui fut involontaire de notre part.

Retour sur les autres œuvres : l’importance du mythe et de l’imaginaire dans la fiction des Rémy

La dimension fantastique et les influences

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Votre premier ouvrage, les Soldats de la mer, vous a identifiés comme des maîtres de la littérature fantastique. Chaque nouvelle des Soldats traite d’un thème fantastique. Comment avez-vous été attirés par ce genre, qui a souvent été considéré en France comme mineur ? Comment vous y inscrivez-vous et comment voyez-vous son avenir ?

AR : J’avoue que nous avons très tôt apprécié ce genre littéraire que sont les nouvelles. Et si les histoires y sont chez nombre d’auteurs parfois d’inspiration fantastique, ce n’était pas non plus pour nous déplaire. Voltaire, Mérimée, Marcel Aymé et d’autres nous montrèrent qu’on pouvait écrire des ouvrages entièrement consacrés au genre couplé : fantastique et nouvelles. Ils nous poussèrent ensuite à lire des auteurs franchement fantastiques, tels que Poe, Hoffmann ou Lovecraft. Tous étaient considérés comme de grands littérateurs et Balzac n’a pas démérité en écrivant la Peau de Chagrin. Le fantastique littéraire n’était pas un genre mineur. Il était à la mode. Maintenant, il ne l’est plus. Peut-être parce qu’il n’est plus vraiment « littéraire », c’est à dire écrit avec soin et qualité du style.

YR : Toutes les autres explications ne sont pas convaincantes. Par exemple, le fameux cartésianisme des Français. J’entends dire que les ouvrages récents entièrement consacrés au fantastique ou à la fantasy sont souvent sur le plan strictement littéraire d’un niveau inégal. Cependant, comme nous ne courons plus les nouveautés, nous ne pouvons nous faire une opinion.

AR : Fantastique, fantasy, SF. Je ne saurais vous dire comment je vois leur avenir. Bien que familière des dons extra-normaux, je ne suis pas une extra-lucide ! Mais déjà en 1967, on nous mettait en garde…
Quand nous avons présenté les Soldats à la Fondation pour la Vocation (nous étions désargentés en ce temps-là), persuadés qu’on était de gagner le prix de mille francs, le jury a estimé que les écrivains pouvaient gagner leur vie en dehors de la littérature. Ils nous ont donc refusé le prix mais nous ont fourni un agent littéraire renommé qui, bien qu’aveugle, vit notre avenir compromis : nous courions à notre perte si nous persistions à écrire des nouvelles, qui plus est fantastiques, l’un et l’autre se vendant très mal ! Nous avons suivi son conseil et rajouté le cadre de la Fédération pour lier entre elles nos nouvelles.

Votre appréhension du fantastique est plutôt en décalage par rapport à celle des autres spécialistes du genre. Vous vous situez plutôt sur du fantastique littéraire, comme ont pu l’être au 19ème siècle des Balzac, Nodier, Erckmann-Chatrian. Ont-ils été des sources d’inspiration pour vous ?

AR : Non. Ils nous confortaient seulement dans notre entêtement à soigner notre style. Ils ne nous ont pas influencés, ni par leur sujet ni par leurs décors.

En lisant votre œuvre, on pense aussi à des auteurs comme Jacques Abeille.

AR : Pour ma part j’aime beaucoup, surtout les Jardins statuaires.

La science-fiction

Le Grand Midi est votre première incursion, assez modeste, dans la science-fiction. Elle sera plus exploitée dans la Maison du Cygne. Avez-vous été tentés de plonger résolument dans un récit de SF ?

YR : Un critique de Télérama avait, dans son article sur ce livre, identifié un passage lorgnant vers la science-fiction, quand on voit les travailleurs recrutés par l’El construire des villes sous coupole mais il aurait pu citer aussi Gregor interrogé par des examinateurs qui ont perdu leur corps, remplacé par des machines. On a abordé plus résolument la SF dans la Maison du Cygne dont le thème est la rivalité entre deux civilisations extraterrestres infiltrées sur Terre. Quant aux Soldats de la Mer, les nouvelles, toutes d’inspiration fantastique, sont encadrées dans une histoire de la Fédération, clin d’œil à Asimov, grand auteur de SF.

Ne peut-on également, dans cette nouvelle, y déceler une dimension mythologique, comme une sorte d’Odyssée ? Les habitants de la Fédération reviennent finalement aux croyances anciennes, celles des divinités grecques aquatiques.

AR : Oui, nous passons là à des thèmes chers à la fantasy.

Le romantisme

Les Soldats et le Grand Midi sont assez marqués par un style romantique, dans une sorte de Mitteleuropa tendance prussienne, comme évoqué plus haut. Ainsi, la nouvelle du vampire (nommé oupire) dans les Soldats, qui fait penser au Vampire de Polidori, davantage qu’au Dracula de Stoker, avec la figure de la femme fatale.

YR : En fait, nous avons été influencés par l’imagerie utilisée dans les films tels que Nosferatu le Vampire de Murnau : le château

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moyenâgeux, le pays sinistre, la forêt qui le lui rend bien.
« Dès que Hutter eut franchi le pont, les fantômes vinrent à sa rencontre. » (3) Pour enfoncer le clou, nous avons appelé notre vampire « oupire », tel qu’on l’appelait dans ces pays lointains d’Europe, la Pologne orientale et la Russie.
Il est vrai qu’il y a toute cette imagerie romantique derrière les histoires fantastiques, et surtout celles de vampires. C’est un classique que nous avons repris à notre compte et qui est tombé en désuétude. Disons que, en renouant avec les racines romantiques du genre, nous sommes peut-être en décalage avec la mode ambiante du fantastique.

Les thèmes récurrents dans l’œuvre des Rémy

La politique et la guerre sont souvent dépassées par le rêve et le désir, considérés comme des moyens d’échapper à la cruauté et la vanité du monde.

Oui, on en parle notamment dans notre nouvelle intitulée Coups de pistolet dans la forêt, éditée dans l’Anthologie 01 de Dystopia et dans l’édition de poche des Soldats. Elle décrit un monde de rêves qui s’empilent les uns sur les autres. Pour le coup, c’est du pur romantisme allemand.

Des parallélismes, qui se retrouvent dans toute votre œuvre, peuvent également être établis : le concret face à l’illusion (ex : le monde parallèle de la Fédération avec ses deux lunes, qui entre, dans une nouvelle, en contact avec notre propre monde), la réalité et le rêve, le monde des vivants et le monde des morts. Ce fonctionnement en miroir, le thème du double, notamment dans la première nouvelle des Soldats, vous attirent-ils parce que vous-mêmes écrivez à quatre mains ?

YR : Le thème du double m’a toujours inspiré et nous l’avons traité dans notre nouvelle des Soldats : “Suicide par imprudence”. Comme vous le remarquez, les deux lunes des Soldats symbolisent les deux univers, celui des hommes et celui des déesses copié sur le premier. Dans la Maison du Cygne, une communauté d’enfants est élevée dans le désert mauritanien tandis que leurs doubles vivent dans leur pays respectif qu’ils n’ont pas quitté. Encore deux exemples dans des nouvelles : un vieux couple qui hante leur maison abandonnée (Maison à vendre) ou un pilote mort qui rejoint ses coéquipiers avec son appareil et se joint à eux dans les missions que l’escadron effectue, intégrant dangereusement son avion dans la patrouille (Comme on chasse ses fantômes). Il est vrai que ce thème est récurrent dans notre œuvre, mais je ne crois pas qu’il nous attire plus particulièrement, parce que notre collaboration n’est pas simultanée au moment de l’écriture.

AR : En effet, c’est Yves qui commence. Et ensuite j’applique la méthode cinématographique du montage sur ce premier matériau. En fait, il me donne les rushes et je tente de leur donner style et rythme. A lui, la liberté de création, à moi les ciseaux, le peaufinage ! Puis chacun corrige de son côté et à la fin, on relit à haute voix pour voir si cela tient la route.

Vos œuvres sont marquées par l’importance de l’initiation, du récit d’apprentissage : initiation spirituelle dans le Grand Midi, passage de l’enfance à l’âge adulte dans la Maison du Cygne, maturation d’un empire dans les Soldats et, dans le conte du Prophète et le Vizir (4), l’évolution de l’humanité sur plusieurs siècles.

AR : C’est vrai. Il n’y a en effet rien de plus beau qu’initier ou être initié soi-même. Le Grand Midi est une initiation à l’amour par exemple. Dans la Maison du Cygne, les doubles des enfants suivent des cours qui sont censés les initier à la pratique de certains pouvoirs spéciaux et, dans le Mont 84, l’étudiant amoureux éconduit est arraché à son mal de vivre et va subir une initiation brutale à la vie de hors-la-loi.

Le Mont 84 est à part dans votre bibliographie : le fantastique y est moins présent (même si le cadre reste celui du monde parallèle des Soldats), c’est davantage un roman d’anticipation, une dystopie (comment la Fédération a accouché d’un Etat policier, dégénéré), plus politique. Qu’est-ce qui vous a motivés dans ce grand écart ?

YR : Quand les Soldats de la Mer sortirent, on fut catalogués écrivains de fantastique. Aussi, résolument, on décida d’écrire un thriller qui devait beaucoup à Bonnie et Clyde. Bourgois et Brisville qui étaient chez Julliard, décontenancés, l’ont refusé ! Nous avons rangé le tapuscrit dans nos archives. Et on se mit à l’écriture du Grand Midi. Quand, des années plus tard (pas loin d’un demi-siècle !) Dystopia nous a proposé de rééditer nos romans, on a ressorti le Mont 84. Lu et approuvé, nous décidâmes toutefois de le réintégrer dans la mouvance de la Fédération. Elle avait disparu mais nous lui inventâmes des colonies qui avaient survécu à la mère-patrie. La trame du roman n’avait pas changé pour autant : un état policier contre lequel des prisonniers, qui avaient notre sympathie, se révoltaient.

Divers : méthode de travail, projets, carrière cinématographique

Votre style est aussi très travaillé : vous avez souvent recours à des termes soutenus ou obsolètes, notamment dans les Soldats. Ecrire dans une langue classique au moment de Mai 68 justement était plutôt une gageure.

AR : Un petit rectificatif : les premières manifestations de mai 68 ont éclaté alors qu’on signait le service de presse. Donc quand les Soldats furent conçus deux ans plus tôt, on ne chantait pas encore la Carmagnole ! Quant à la question du style, retour à Borges. Ce style un peu désuet, surtout dans les Soldats, a beaucoup plu à Bourgois et Brisville et à la majorité des critiques en général. Même Jean d’Ormesson avait dit qu’il s’agissait d’un chef-d’œuvre qui n’avait pas fini de faire parler de lui. On pensait qu’on allait gagner notre vie en tant que romanciers, ce qui n’a pas été le cas, comme on l’a dit.

YR : Les critiques élogieuses des Soldats se trouvaient surtout dans les grands quotidiens régionaux, notamment dans la Voix du Nord grâce à Paul Guth.

Avez-vous encore des nouvelles ou romans inédits ?

AR : On remet sur le métier nos nouvelles non éditées, qui sont très nombreuses. On a également un roman sur le cinéma, qui s’intitule le Fou de la star, un de nos tout premiers livres. Il a eu plusieurs versions différentes. Il raconte l’histoire d’un jeune homme passionné de cinéma et des stars américaines comme Lauren Bacall ou Rita Hayworth et qui finit par ne plus voir dans sa compagne qu’une de ces stars.

YR : Quant à moi, je m’attelle à un roman que nous n’avons jamais réussi à maîtriser et qui racontait les souvenirs de guerre d’anciens combattants. J’essaie de le découper en nouvelles.

A partir des années 80, vous vous consacrez quasi exclusivement à votre carrière de cinéaste. Comment le travail de cinéaste se conjugue-t-il avec celle de romancier ? Avez-vous déjà été approchés pour adapter un de vos récits sur le grand écran ?

AR : On continuait quand même à écrire, notamment le Mont 84 qui nous tenait à cœur et qu’on ne désespérait pas de voir un jour publié.

YR : Mais les nombreux tournages que nous avons faits dans des milieux si différents avec des gens parfois si exceptionnels ne nous ont pas inspiré de nouveaux sujets. La nouvelle “Comme on chasse ses fantômes”, alias Naissance, vie et mort d’un fantôme, est très révélatrice à ce titre : l’histoire ahurissante de cet avion américain supersonique nous a été racontée par des pilotes que nous venions de filmer.

AR : Pour ce qui est de notre travail, notre coopération littéraire et notre coopération cinématographique sont identiques, Yves prenant le pas sur moi et moi sur lui dans différentes étapes de la création.

YR : Nous avons présenté le Fou de la star à l’avance sur recette du CNC. Il a d’abord été accepté, puis refusé sur l’intervention véhémente de la présidente !

AR : On a déjà été approchés pour l’adaptation du Grand Midi sur grand écran mais malheureusement, cela ne s’est pas fait. Il s’agissait d’un Belge amateur de nos livres. Il avait demandé les droits à Bourgois et avait élaboré un scénario formidable mais il n’a pas réussi.

Selon un article récent du Monde, près de 300 livres sont publiés ou réédités chaque jour, ce qui conduit à une surabondance de la production littéraire et pousse les libraires à faire des choix draconiens, voire militants, dans leur stock. Avez-vous déjà subi les conséquences de cette production pléthorique ? Pensez-vous que nous nous dirigeons vers un trop-plein, un écœurement et, par conséquent, un appauvrissement de la création littéraire ?

YR : Nous ne sommes pas touchés par cette surabondance de livres édités et diffusés car nous ne sommes distribués que dans quelques librairies qui partagent avec notre éditeur les mêmes goûts. Ces trop rares libraires et les quelques petits éditeurs qui les fournissent sont impuissants à mettre un frein au long déclin du genre fantastique qui perd de plus en plus de lecteurs. Ils le maintiennent vaille que vaille. Sans eux, le fantastique finirait par n’être plus qu’un courant littéraire démodé, pour ne pas dire un ruisselet. Et pourtant les Anglais ont plébiscité de grandes sagas qui ont obtenu dans le monde entier, y compris en France, de grands succès. Est-ce que la fantasy a détrôné le fantastique ? Pourtant, je crois que de rares auteurs français tirent leur épingle du jeu et font de beaux scores en ne renonçant pas à téter la veine fantastique. Nous disions tout à l’heure que la désaffection du public pour le fantastique était peut-être imputable au manque de soin apporté par beaucoup trop d’auteurs à leur texte, et aux collections de littérature de gare qui les publient. Je le crois toujours mais les grands éditeurs non spécialisés qui accueillent avec mépris les auteurs qui leur proposent un manuscrit marqué du genre fantastique, les prescripteurs et les critiques qui n’en rendent pas compte dans leurs journaux ou revues de qualité portent une responsabilité non négligeable.

Cet appauvrissement peut aussi se remarquer dans le domaine du cinéma, et j’interroge ici les deux cinéastes que vous êtes.

AR : Le cinéma possède d’autres armes pour continuer à être un vecteur positif pour les films fantastiques. Les acteurs hommes et femmes renommés et qui ont du charisme, les effets spéciaux toujours plus sophistiqués, les décors, le choix de territoires extraordinaires, les musiques, tout ce beau monde apporte lui-même une aide… fantastique au genre qu’il défend.

Notes

(1) Troisième roman des Rémy (1978), Grand prix de l’Imaginaire en 1979. Il narre l’établissement, l’évolution et la chute d’une colonie d’enfants, appelée El Golem, située en plein désert mauritanien et organisée par une civilisation extraterrestre (la Maison du Cygne, contrecarrée dans ses projets par son ennemie héréditaire la Maison de l’Aigle) dans le but d’en faire des modèles accomplis de vertu et de morale.

(2) Rédigé dans les années 70, il n’a été édité qu’en 2015 par les éditions Dystopia. Récit de chasse à l’homme dans l’univers de la Fédération (alors disparue) de Laërne, déjà exposé dans les Soldats de la Mer. Deux forçats récemment évadés et avides de vengeance entraînent dans leur course mortelle contre l’Etat autoritaire et policier un étudiant idéaliste en mal d’amour. L’action ne se situe plus dans une atmosphère germanisante du XIXème siècle mais dans un succédané d’Amérique latine, en zone tropicale, dans un futur plus ou moins proche.

(3) Citation du Nosferatu de Murnau

(4) Recueil édité en 2012 et constitué de deux nouvelles qui se font suite. Au Moyen-Age, un pauvre pêcheur du Golfe Persique affublé de six doigts développe des dons de voyance et est appelé au service d’un émir. Or, ses dons ne lui permettent que de voir l’avenir du monde tel qu’il sera des centaines d’années plus tard et sa précognition se réduit au fur et à mesure que la propre mort du pêcheur approche.

Entretien réalisé par Guillaume Narguet