Raymond Depardon Glasgow, Écosse, 1980 34 x 51 cm © Raymond Depardon / Magnum Photos
Raymond Depardon Glasgow, Écosse, 1980 © Raymond Depardon / Magnum Photos

L’exposition qui se tient en ce moment au Grand Palais retrace le parcours de la couleur dans l’oeuvre de Raymond Depardon. D’abord présente dans ses première photographies, on la retrouve ensuite au fil des reportages et des voyages, jusqu’à sa réapparition dans son travail des années 2000. Plus que d’un moment, c’est d’un parcours dont il est question.

© Affiche Réunion des musées nationaux - Grand Palais, 2013 / Magnum Photos
© Affiche Réunion des musées nationaux

Les 150 photographies de l’exposition sont réparties dans une seule grande salle aux murs blancs. Le parcours s’y fait de manière chronologique, depuis les « années déclic » jusqu’à ce « moment si doux » qui donne son titre à l’exposition. On explore ainsi tour à tour la ferme du Garet où le photographe a vu le jour, le Chili d’Allende ou encore le Glasgow des années 80. Les textes de Depardon, à la première personne, expriment sa conception de la photographie et de la couleur au fil des périodes précitée. L’intelligence de cette exposition est sans doute de prendre à contre-pied l’image de Depardon que se fait le grand public. En effet le photographe, s’il est très connu des Français, l’est surtout pour ses photographie d’un Paris d’Épinal en noir et blanc. Or, on le découvre ici en photographe de la couleur et du voyage, en photographe non pas d’une époque nostalgique mais de la modernité.

Raymond Depardon a grandi dans une ferme où il fait ses premières expériences de la photographie. Agé de 16 ans, il monte à Paris et devient l’apprenti d’un photographe. Dans un premier temps paparazzi, il accède rapidement au statut de reporter et découvre l’Afrique, le désert et les voyages. La couleur, d’abord perçue par le photographe comme une contrainte, deviendra dans les années 80 une véritable évidence pour lui. Le cinéma l’en écartera pendant un moment, faisant de sa photographie le lieu de noirs et blancs dans la tradition de la modernité européenne. Lorsqu’il revient à la couleur, c’est de façon plus mature, et peut-être aussi plus apaisée,  d’où ce « moment si doux ». Désormais, la couleur chez Depardon manifeste un plaisir de la photographie, elle s’associe à la douceur, à la simplicité. Or, cette compréhension de la couleur dans le travail récent du photographe nous éclaire sur le reste de son oeuvre. En effet, en prenant le temps de refaire un tour de la salle, on perçoit mieux que la couleur a ici quelque chose de profondément humain, de doux, de sécurisant. Elle nous dit quelque chose de l’artiste : la douceur de son rapport au monde.

On découvre ici Depardon en photographe non pas d’une époque nostalgique mais de la modernité.

Si l’exposition constitue sans nul doute une bonne rétrospective sur l’oeuvre de Depardon et tient ses promesses, il est dommage qu’elle ne soit pas plus longue. En effet, une demi-heure suffit largement à faire deux fois le tour de la salle, ce qui est assez regrettable compte tenu du prix d’entrée qui reste élevé, même au tarif réduit. L’exposition reste donc un bon point d’entrée pour plonger ou se replonger dans l’œuvre de Depardon, mais ne constitue pas une vision exhaustive de son travail. A chacun donc le choix de continuer le voyage, notamment en redécouvrant les films de Depardon à la Cinémathèque française fin novembre puis au MK2 Grand Palais à partir du 2 décembre, le tout en copie restaurées. On peut également prendre le temps de relire ses ouvrages, disponibles en grandes partie chez les éditions Points. L’œuvre de Depardon est à la fois unique et multiple : photographie, cinéma et littérature constitue les facettes d’une même personnalité, à côté de laquelle il serait regrettable de passer sans s’arrêter.

Pauline Gounelle

  • Un moment si doux, au Grand Palais du 14 novembre 2013 au 10 février 2014.
  • Tarifs : Plein 11€ – Réduit 8€ – Gratuit pour les moins de 16 ans, les bénéficiaires du RSA et du minimum vieillesse.

Pour aller plus loin :

  • Rétrospective Raymond Depardon à la Cinémathèque, du 14 novembre eu 16 décembre 2013, puis au MK2 Grand Palais à partir du 2 décembre 2013.
  • Les Années déclic 1957 – 1977, de Raymond Depardon et Roger Ikhlef, disponible en VOD chez Arte.
  • Errance, Paysans, Afrique(s) et d’autres ouvrages de Depardon sont disponibles via les éditions Points.
©  Raymond Depardon / Magnum Photos
© Raymond Depardon / Magnum Photos