120 battements cover
Le drame de Robin Campillo fait battre le cœur de la critique dans un enthousiasme unanime et mérité. Pépite sur laquelle on ne peut faire l’impasse, 120 battements par minute traite d’un sujet grave avec une sensibilité et une retenue désarmantes. À l’écran, ce sont des malades du SIDA qui prennent les armes, celles de la dénonciation, pour faire entendre leur cri du cœur. Dans la France des années 1990, ce récit politique prend un tour humaniste en s’imposant comme la claque émotionnelle du 70e Festival de Cannes.

Chronique des prémices de la lutte contre le SIDA, 120 battements par minute est un pamphlet contre la politique gouvernementale de François Mitterrand et les laboratoires en charge de contrer l’épidémie. Le combat est vaste, tout comme les actions choc qui jalonnent l’intrigue. Le bras de fer entre l’association Act Up-Paris et ceux qu’ils jugent responsables de leur déclin est introduit par une séquence d’ouverture magnétique. Elle donne le ton en nous plongeant dans les coulisses d’une conférence scientifique. Quand la colère des militants jaillit, les projecteurs braqués sur eux sont comme le passage de l’ombre à la lumière, celui de la méconnaissance à la vérité. Tension et émotion ne lâcheront, dès lors, plus le spectateur.

Une jeunesse entre aspirations et désillusions

La rage au cœur, le clan de combattants du VIH poursuit sa croisade, non sans dissensions internes. Cherchant à atteindre un même but sans emprunter la même voie, les membres d’Act Up-Paris livrent une ode de la démocratie, dans l’amphithéâtre de leurs débats en huis clos. « L’ignorance tue », lit-on sur une banderole. Instructif, poignant et toujours juste, le dernier-né du réalisateur d’Eastern Boys fait plus de 120 minutes (2h20) mais ne souffre d’aucune longueur, ni pathos ou stéréotype. On salue l’équilibre parfaitement maîtrisé des séquences à l’énergie communicative et des temps de respiration, où l’intime prend tout son sens.

120 battements

Original et nécessaire

Le casting regorge de talents prometteurs et se dote de la présence d’Adèle Haenel en cheftaine de file non-violente. Mention spéciale au duo que forment Nahuel Perez Biscayart (Sean) et Arnaud Valois (Nathan), qui a arracher des larmes à des festivaliers qui semblaient tous retenir leur souffle. Les pulsations des aléas de nos « séropos » se dessinent au rythme d’une BO nineties revisitée. Dressant un pont entre passé et présent, 120 battements par minute rappelle par petites touches à quel point son thème est universel et, malheureusement, toujours actuel. On notera le peu de repères chronologiques (des vêtements, une Game Boy, un téléviseur à tube cathodique), qui permettent à l’œuvre d’avoir son propre tempo.

Riche de mille pistes de réflexion, le film de Campillo invite à regarder dans le rétroviseur de l’histoire pour mieux aborder l’instant présent et l’avenir. Une œuvre puissante, qui prend aux tripes autant qu’elle prend au cœur. À voir absolument.

120 battements par minute, de Robin Campillo, avec Adèle Haenel, Nahuel Perez Biscayart et Arnaud Valois. En Compétition, sortie prévue le 23 août.