Qui ne s’est jamais interrogé sur la vie sexuelle de son animal de compagnie ? Dans ce texte mordant, Aymeric Patricot découvre celle de sa tortue, qu’il prenait pour un animal triste et apathique, mais dont il découvre les grands appétits. Une fiction qui interroge la folie couvant dans les espaces pavillonnaires, où la vie semble pourtant si tranquille.

Mes parents venaient d’acheter une maison et nous avons couru dans le jardin pour aller y voir la tortue. Les enfants des prédécesseurs l’avaient surnommée Véra Cracra, étonnés de la voir sortir si sale de ses hibernations. C’était une tortue d’Hermann. Longtemps, nous avons pensé qu’elle était dénuée d’affect. Elle se contentait de sortir sa tête sèche, les yeux mi-clos, pour nous suivre à la moindre alerte. Elle happait les morceaux de fruits, de préférence juteux et colorés, qu’elle tailladait d’une bouche cruelle, avant de semer sur le chemin ses coliques de plaisir.

Seulement, Véra Cracra s’est révélée plus humaine que ce que nous pensions. Malgré sa face inexpressive, elle se pressait auprès de nous, tendait fort la tête pour qu’on lui caresse le cou, se crispait avec énergie quand on lui grattait la carapace. Cette évidence de plaisir nous a rapidement persuadés qu’elle était un véritable animal de compagnie, sympathique et sensible.

Sa sensualité a pris un tour inattendu le jour où nous avons entendu percer de curieuses sonneries du fond d’un buisson de laurier. Une fois les branches écartées, nous avons découvert la tortue dressée, presque e...