Parfois, l’acte d’écrire sert à mettre à nu ses émotions profondes et à dénoncer les injustices vécues. Dans un texte puissant et indispensable, Mahir Guven appelle à une résistance franche contre toute forme d’oppression.
Vous ne nous tuerez pas. Ni notre volonté, ni notre envie de vivre et de vivre avec. Nous serons là. Face à vous. Nous ne partirons pas. Nous ne mourrons pas. Et plus vous nous répéterez de nous taire, plus notre silence étouffera vos cris.
Vous ne nous tuerez pas. Les gens de bonne volonté, les gens de paix, les gens du dialogue, de l’entraide, de la solidarité, les gens qui refusent la violence. Les gens amoureux de l’apaisement, de la mémoire, de la justice, les gens qui aiment réfléchir, proposer, les gens persuadés que face à un problème, il existe toujours plus d’une solution.
Vous ne nous tuerez pas. Si nous disparaissons, il restera nos traces, nos esprits, nos histoires, nos manières d’être, notre douceur, et alors il faudra les effacer. Mais en nous effaçant, vous vous effacerez aussi. Car dans vous, il y a nous. Ce qui signifie que dans nous, il y a aussi un peu de vous. Sans cela, vous ne seriez pas là. S’il nous arrivait de partir, vous auriez toujours les mêmes problèmes. Et alors, vous en feriez partir d’autres. Et encore d’autres. Jusqu’à ce qu’il n’y ait plus personne. Sauf les problèmes, qui eux resteraient. Et après cela, comment les résoudre ?
Vous ne nous tuerez pas. Car nous croyons à la vie. Aux sourires. À la bonne humeur. Aux excuses. Aux remords. Aux regrets. Nous aimons les enfants, nous aimons les champs, les forêts, les cafés, les cinémas, la musique, les librairies, les journaux, les débats, les marchés, les promenades, la vie de famille, les anniversaires, les mariages, les fêtes. Nous aimons rire. Nous aimons aimer et nous savons aimer ceux qui ne nous ressemblent pas. Nous savons vivre avec eux. Par exemple, nous avons su vivre avec vous.
Vous avez essayé deux, douze, soixante-seize fois, aux quatre coins de la planète, vous vous êtes lassés, vous vous êtes perdus, vous avez perdu. Si vous ne l’avez pas compris, vous ne nous tuerez pas.