Elle se tordait, se repliait tout entière pour serrer ses oreilles entre ses genoux, les pressa bien fort, jusqu’à s’en mordre les peaux. Elle se disait de longues prières pour faire taire la douleur. Mais ses plaintes vibraient en dedans, vibraient d’un long pleur dans le ventre. Elle était malade, les choses suivraient leur cours, demain elle irait mieux. Elle commençait à rêver d’un gros caillou qui respirait, se nourrissait de sa douleur, mâchait sa douleur. Elle sentit s’écouler une vase chaude sur son anus. Elle eut une pensée pour les draps blancs et se dégoûta de ce qu’elle était. Elle respira sous la couette l’odeur acre de sang et de merde. Il allait falloir tout laver, peut-être que les draps garderaient pour toujours la trace pourpre de sa douleur, qu’elle allait devoir les jeter et en acheter de nouveaux, des blancs, en lin pour l’été. Il fait terriblement chaud ici en août, sous la taule du 7e étage, qui cuit sa viande comme dans un four. Que s’était-il passé pour être punie comme ça ? Elle pensait à demain, au boulot, elle allait devoir tout expliquer, *« Mais quoi, encore un congé, mais Mathilde, quand même, je veux bien que vous soyez d’une nature fragile, mais depuis 7 mois c’est assez fréquent, on n’est pas ici pour faire la charité, et en plus dernièrement, c’est à peine si vous vous rappelez pourquoi vous êtes là, toujours à penser à autre chose, vous avez bien de la chance qu’il y ait les prud’hommes, croyez-moi, j’ai déjà pensé à me débarrasser de vous, c’est pas avec des incapables comme vous qu’on fait tourner ce pays »*.
La grosse crampe qui lui poussait dans le ventre se contracta, fit passer une grosse aiguille dans les disques des reins et elle hurla. Le poids immense de la douleur se pressa sur son ventre et un flot se déversa de son entrejambe sur le lit et se forma une petite flaque chaude et puante dans laquelle baignaient ses organes. Elle se vidait dans un grand flot qu’elle retenait depuis quelques mois, qui grossissait et gesticulait en douleur et en nausées et maintenant, il allait sortir et naître dans le petit étang vaseux du lit. Elle pensait à se lever, mais les jambes coupées ne répondaient qu’à leur vibration et elle serra fort ses dents sous la pression, elle serra et sa peau suintait, brûlante, s’inventait de la tuyauterie pour tout échapper, pour tout sortir à la surface. Du front, des seins, des pieds, des fesses et de la chatte se déversaient des flots entiers de fluide boueux. Et comme le gros caillou bouchait l’entrée, le flot s’amincissait pour ne laisser couler que quelques gouttes.
Elle ira mieux, demain elle se lèvera, et passera ses draps à la machine pour tout oublier, elle les verra sécher, bla...