Dédié aux premières amours, le dernier roman d’Harold Cobert, Lignes brisées, conjugue retrouvailles au présent et rendez-vous manqués du passé, dans une mise en abyme très maîtrisée.
“Il y a deux sortes d’amours manquées : celles qui n’ont jamais commencé et dont on ne connaîtra jamais les regrets, et les pires, celles qui n’ont commencé qu’après avoir fini – et qui n’en finissent pas de mourir sans que nous ayons pu les vivre jusqu’au bout ». Placé en exergue du roman et prononcé ensuite par le héros, Gabriel, cet extrait des Puissances du mal de Jean-Edern Hallier donne le ton.
C’est en effet de la relation entre Gabriel et Salomé, toujours en suspens vingt ans après leur brève histoire au lycée, dont il sera question ici. A 40 ans, Gabriel est un écrivain à succès. Il se rend à Bruxelles pour défendre son nouveau roman Lignes brisées, dédié à son histoire avec Salomé, aujourd’hui assistante parlementaire dans la capitale européenne. Quinze ans après leur dernière rencontre, ils doivent enfin se revoir. Même si Salomé s’est, depuis, mariée et a eu une fille, Gabriel espère encore la reconquérir. Son nouveau livre doit être l’une des clés de sa réussite : en relatant leur histoire à Salomé d’après son propre point de vue, il semble vouloir mettre fin aux incompréhensions du passé et lui révéler combien il l’a toujours aimée.
Au fil des 127 pages de ce court roman, Harold Cobert insère des passages du livre de Gabriel tout en amenant le lecteur vers la rencontre finale, sa véritable apogée.
Silences et rendez-vous manqués
L’écriture très maîtrisée d’Harold Cobert séduit. C’est avec doigté qu’il nous fait entrer dans ce passé obsédant, fait de silences et de rendez-vous manqués
L’écriture très maîtrisée d’Harold Cobert séduit. C’est avec doigté qu’il nous fait entrer dans ce passé obsédant, fait de silences et de rendez-vous manqués, et qu’il nous interroge sur l’amour et le temps qui passe. L’amour peut-il renaître après tant d’années et d’incompréhensions ? Mais a contrario, la page peut-elle être complètement tournée ? Harold Cobert décrit également très bien les émois du Gabriel adolescent face aux jeunes filles, ses hésitations d’alors devant l’amour, ses sentiments d’aujourd’hui pour Salomé.
Très agréable à parcourir, Lignes Brisées est un roman dont on regrette qu’il soit si court. Alors que la deuxième partie est entièrement consacrée à la rencontre finale, on aurait aimé, avant cela, entrer davantage dans l’intimité des personnages pour donner plus de force au dénouement.
- Lignes brisées d’Harold Cobert, éditions EHO, 127 pages, 15 euros, mars 2015
Bérengère de Chocqueuse