Peu de mots suffiront pour parler du roman de Nour Malowé, Le Printemps Reviendra (Éditions Récamier), qui se déroule au cœur de l’Afghanistan contemporain reconquis par les Talibans. Un roman captivant dans le pire sens du terme, un récit vers l’inexorable, l’histoire d’une mise à mort.
« Les mots suivent une logique progressive. Que l’histoire suivra aussi. » C’est cette histoire qui est racontée. Celle d’un piège qui se referme, fait après fait, jusqu’à l’implosion finale.
Sous la forme d’un compte à rebours jusqu’au jour du départ des États-Unis, nous suivons le quotidien de Marwa, femme afghane cinquantenaire, chirurgienne et mère de trois enfants. Au fil des pages, Nour Malowé dessine le portrait d’une femme bienveillante, compétente dans son travail, d’une épouse comblée et d’une mère heureuse. Tout cela menace d’être détruit par l’arrivée des Talibans alors que dans tout le pays, c’est l’hémorragie : on fuit, on cherche l’exil dans l’espoir d’une vie meilleure.
Pendant soixante jours, ce sont les enfants de Kaboul contre « ceux qui arrivent ». La puissance du roman vient en grande partie de ses personnages : ils sont anonymes au bord du chemin, un frère, une sœur, un voisin. Profondément quotidiens et humains, ils se gravent dans notre imagination et se rendent inoubliables.
Il y a Hamed aux « yeux fauves » qui incarne la haine à l’état pur. Mais il y a aussi Ahmad le jeune peintre qui résiste avec son art et Belkheir, le combattant populaire qui ne sait pas tirer, qui « a vingt ans [et] a sa vie à défendre. » Des mots insoutenables pour raconter la tragédie d’hommes et de femmes résignés à mourir, mais prêts à le faire pour une cause qui semble perdue d’avance.
L’écriture les fait évoluer dans un espace où tout est fait pour blesser : la naissance, une chute, un attentat au coin de la rue. Tout est mis au même niveau, car c’est le quotidien de Kaboul. Et à mesure que le temps se délite, le carnage devient palpable. S’enchaînent les vignettes d’anonymes détruits par une réalité qui s’approche, qui enferre. Des mots comme « brûler”, « cadavres », « égorger », deviennent palpables, car « ceux qui arrivent » ne sont plus une prophétie. Au fil des pages, ils deviennent le présent.
Le roman place les femmes sous le signe de l’enfermement, de l’angoisse, mais aussi du refus.
« Une furieuse envie de vivre »
Dans ce présent inévitable, Nour Malowé parle des femmes et de leur « furieuse envie de vivre. » Dans leur monde où presque tout est haram (interdit, illégal), l’infiniment petit devient infiniment grand, l’écriture vient mettre en valeur ces gestes banals qui seront bientôt criminels : le vernis est une indécence, le pantalon une insulte, « l’innocence de la chevelure n’est pas reconnue ici. »
Le roman place les femmes sous le signe de l’enfermement, de l’angoisse, mais aussi du refus. Un refus de la mélancolie, du désespoir, p...