Il y a des romans qui résonnent en nous tellement fort que l’on se demande si l’auteur.ice ne s’est pas infiltré.e dans notre tête, notre corps ou notre cœur pour l’écrire. C’est l’impression que m’a faite Celle qui fugue de Cécile Tlili.

« Faire connaître le goût infect de la fin de l’amour, ce fruit qui n’a pourri que d’un côté. »
La quatrième de couverture annonce « Alice erre en Corse » après que son mari, Damien, l’a quittée. Pourtant, à la première page, on trouve Alice de retour sur le continent, dans sa ville, après une rupture amoureuse tellement brutale qu’elle a dû s’enfuir par survie psychique. Mais elle est bien rentrée, a loué un appartement, sans prévenir son bientôt ex-mari, ni leur fille de son retour et on la découvre au pire de la rupture amoureuse, au moment du choc qui paralyse, où l’on prend malgré soi « rendez-vous avec la nuit ».
C’est comment, la fin de l’amour ? C’est exactement comme le raconte Cécile Tlili dans Celle qui fugue où ne sera raconté que l’essentiel : des réveils à 2h, 3h, 4h du matin, des jours et des nuits vides de tout, la perte de soi la plus totale, mais aussi le chemin pour s’en relever, le temps qui passe et qui ne guérit pas toujours, les rencontres qui blessent et celles qui sauvent.
Alice s’enfonce dans sa ville comme un couteau dans une plaie. Elle se retrouve « soudain à emboîter le pas de celle [qu’elle a] été », dépossédée de son jugement par les nuits sans sommeil, elle cherche par tous les moyens une manière d’esquiver sa tristesse : « Je me dirige vers le pub le plus proche. Là-bas, sûrement, il y aura des hommes. Je ne vois pas quel bien cela pourrait me faire de rencontrer un homme, mais je me dis que cela pourrait peut-être faire du mal à Damien ».
Dans la première partie du roman, on est plongé dans le monologue intérieur d’Alice. Elle y sonde la fin de l’amour avec une langue précise et qui va droit au but : « Notre histoire se résume peut-être à cela, à la formation d’un vide, discret d’abord, souterrain, gonflant peu à peu, en silence, jusqu’à ce que sa cloche atteigne la surface et effondre en un instant le sol que nous pensions solidement an...