Que répondre à celles et ceux qui considèrent les oppressions systémiques comme des mythes sociaux inventés par des féministes en colère ? L’ouvrage de Giulia Foïs, “Pas tous les hommes quand même !“, se dresse en rempart contre cette myopie volontaire qui se drape dans l’objectivité pour nier les structures de domination. Refuser de voir la culture du viol, minimiser les violences sexistes, invoquer la neutralité : autant de stratégies que Foïs expose avec une rigueur acérée et un style d’une mordacité tranchante. Ce livre apparaît comme une démonstration méthodique, voire scientifique car nourrie de chiffres irréfutables et de récits glaçants, d’une évidence qui dérange tant qu’elle suscite la dénégation. La réalité, pourtant, est là, vorace, et le système du #NotAllMen en est l’un des symptômes les plus ancrés et diagnostiqués.

“Pas tous les hommes quand même !” de Giulia Foïs est un un essai incisif, structuré en sept chapitres, qui analyse le mécanisme du déni face aux violences sexistes et sexuelles. Loin d’un simple pamphlet, l’ouvrage s’appuie sur une rigoureuse enquête sociologique, mêlant statistiques, récits judiciaires, et décryptage des discours masculins d’auto-exonération. Le style, à la fois tranchant et rythmé, jongle avec ironie mordante et gravité, mais avec une intelligence qui rend à la réalité de notre monde toute sa substance. L’autrice démonte le réflexe du #NotAllMen, qui détourne systématiquement l’attention du problème en recentrant le débat sur l’ego masculin, et met en lumière la culture de l’excuse qui protège les agresseurs. Le procès des viols de Mazan, fil rouge du livre, illustre l’impunité structurelle et l’inversion de la culpabilité qui pèsent sur les victimes. Plus qu’un constat, cet ouvrage est une interpellation directe, une exigence de responsabilité adressée à tous, et surtout à celles et ceux qui se complaisent dans le déni des violences, pourtant présentes partout, qu’elles soient devant nos yeux ou à nos oreilles.

L’évitement comme réflexe de domination

Les dénonciations de violences sexistes sont immédiatement suivies d’un contre-feu comme réajustement discursif visant à détourner le regard du problème réel. « Le viol est le crime le mieux partagé par tous les milieux sociaux, mais #NotAllMen. » Cette formule, sèche et implacable, déconstruit en quelques mots la rhétorique de la dilution : en rappelant que le viol est un phénomène systémique, elle démonte l’idée qu’il s’agirait de cas isolés commis par des monstres marginaux. C’est précisément parce que cette violence est un pilier du patriarcat qu’elle est invisibilisée.

Cet ouvrage est une interpellation directe, une exigence de responsabilité adressée à tous, et surtout à celles et ceux qui se complaisent dans le déni des violences.

Le #NotAllMen, ce mantra de l’auto-exonération impose un silence défensif à celles qui dénoncent l’impunité. Foïs le montre avec un mélange de colère et d’ironie mordantes : « Dixième commentaire, soit quelques minutes à peine après le partage de la vidéo : “Déso, mais pour moi, c’est not all men, surtout pas mon père, mon frère, encore moins mon chéri. » Ce réflexe pavlovien dérobe la parole aux victimes pour restaurer un imaginaire masculin immaculé. Le viol n’est même plus central ici car ce qui importe, c’est que les hommes n’aient pas à porter la moindre responsabilité collective. Or, le viol est un crime collectif avant d’être un crime individuel. Non pas qu’il soit toujours commis en réunion, mais parce qu’il est rendu possible par un ensemble de croyances, d’excuses et d’omissions qui le protègent.

La culture de l’excuse : mécanisme d’impunité masculine

Ce qui est frappant, notamment dans le procès des viols de Mazan, que Foïs analyse avec une minutie terrifiante, est l’absence totale de reconnaissance. Cinquante et un hommes, mais bien sûr aucun violeur. ...