Dans Le Prix de la victoire, Karl Marlantes met en avant des valeurs universelles, essaie de faire triompher l’humanité sur les conflits latents, le ressentiment et la haine de l’autre. 

En 1946, alors que s’ouvre ce roman traduit par Suzy Borello, la Finlande est divisée, plusieurs alliances contraires pendant la Seconde Guerre mondiale ayant laissé des traces sur la population, de même que son histoire plus lointaine, datant d’avant la révolution d’Octobre. Sympathie communiste ou hostilité extrême envers les soviétiques, méfiance envers les Américains et sentiment nationaliste se font écho et se bousculent dans ce pays en plein bouleversement après l’armistice de Moscou qui met fin à la Guerre d’Hiver et prive la Finlande d’une partie de son territoire au profit de l’URSS. 

Un lieutenant-colonel et une ingénue

C’est dans ce contexte qu’Arnie Koski, Scandinave par ses ancêtres qui ont planté de nouvelles racines dans l’Oregon, est nommé attaché militaire à la légation américaine de Helsinki. La scierie familiale l’attend, son père et ses proches veillant sur lui depuis l’autre côté de l’Atlantique. L’auteur s’inspire de sa propre histoire familiale pour bâtir ce livre, et les références discrètes à Faire bientôt éclater la terre, son précédent roman, viennent ainsi rappeler le contexte dans lequel lui-même a évolué. Arnie, bien loin de cet Oregon où vivent certains des héros de Faire bientôt éclater la terre, emmène avec lui dans son périple sa douce et innocente épouse, Louise. Celle-ci a grandi dans l’Oklahoma, loin du tourbillon diplomatique, puis elle a été une fière membre de la sororité Delta Gamma à l’université. Elle se félicite d’ailleurs de la vie sociale qu’elle menait pendant ses études, érigeant ses réussites comme la garantie qu’elle fera tout aussi bien en tant que femme de diplomate. 

Pourtant, son optimisme naïf la rend inapte à tenir sa langue et à nouer les liens qu’elle devrait établir puis choyer. À la place, elle devient amie avec Natalya Bobrova, la compagne d’un ancien frère d’armes russe d’Arnie – les Soviétiques et les Américains ont été alliés et ont combattu ensemble avant que leurs divergences idéologiques n’achèvent de les éloigner et de geler des relations déjà bien fraîches. La Guerre Fr...