Pour son premier film, Laura Carreira nous propose une immersion dans le quotidien d’Aurora, travailleuse immigrée et invisible, noyée sous les protocoles d’un entrepôt écossais. Un hommage pudique, d’une douceur austère, à ceux pour qui faire au mieux n’est jamais assez. Parmi la liste peu alléchante des films d’épouvante qui s’annoncent à l’approche d’Halloween, on pourrait presque voir figurer On Falling, de la réalisatrice portugaise Laura Carreira. Sans sursaut ni jump scares, c’est dans une horreur bien plus discrète que nous plonge ce film qui interroge docilement l’effacement progressif de l’humain sous les protocoles d’une économie libérale.

Sur la ligne de crête entre le travail et l’aliénation, Aurora, immigrée portugaise en Écosse, tente de rester debout malgré son quotidien gris rythmé par un travail ingrat de préparatrice de commandes dans un entrepôt de la périphérie d’Édimbourg. Mais entre les horaires, les bips, les badges, les cartons et les codes-barres, difficile d’échapper à la solitude.

S’inscrivant dans la lignée du réalisme social de Ken Loach, avec lequel le film de Laura Carreira partage la même société de production mère, Sixteen Films, On Falling ne s’affranchit pas des bancs de l’école, mais n’en demeure pas moins touchant dans sa justesse distancée.

Tragédie souterraine

On Falling est l’histoire d’une chute. Non pas de celles qui résonnent avec fracas, que l’on remarque, dont on identifie la cause avec précision, mais d’un glissement à peine perceptible. On attend alors un drame qui ne vient jamais : au sensationnalisme, Laura Carreira préfère puiser dans l’onde souterraine d’une tragédie latente.

Au travail, Aurora est confrontée tous les jours à la tyrannie silencieuse des politiques de rendement. Son allure est scrutée, ses pauses chronométrées, et sa productivité récompensée par des barres chocolatées. Là se loge l’humiliation moderne : celle qui n’humilie plus frontalement, mais par sourires de contremaîtres et mains de marionnettistes invisibles. Si Aurora tente tant bien que mal de chercher du réconfort dans ses relations avec ses collègues, la psychologie silencieuse des salles de pause aseptisées, où l’on parle plus volontiers des dernières séries à voir absolument que de soi, ne lui offre que frustration et simulacre de communauté.

“Dans cette capacité à filmer sans misérabilisme l’âpreté d’un quotidien aliénant, On Falling s’inscrit ainsi dans la lignée des Temps Modernes, le burlesque en moins”

Quant à sa colocat...