Danser sous la pluie de Pauline Bilisari, recueil de poèmes intenses et introspectifs, retrace un itinéraire personnel en cinq étapes qui accompagnent le mouvement intime  de la voix poétique vers la renaissance. Au cœur de cette œuvre réside une douleur plurielle : le deuil dévastateur d’un être cher, des blessures familiales marquées par l’incompréhension, et une perte de soi profonde. Le récit de résilience archétypale est écarté au profit de l’écriture d’une reconstruction vacillante mais sincère. Avec un langage poétique d’une véracité parfois brutale, Bilisari dissèque la douleur, la culpabilité, la mémoire et l’effort fragile de réconciliation, révélant ainsi son humanité à la fois vulnérable et résolument combative.

En découpant son récit en cinq parties – « Premiers pas », « Trébucher », « Se relever », « Composer » et enfin « Danser » –, l’autrice façonne une structure organique qui respire et évolue avec la complexité du processus de guérison.

« Premiers pas » : marcher vers l’abîme

Dans « Premiers pas », la douleur de la voix poétique est omniprésente, tout comme l’hésitation de la narratrice à avancer : se confronter à ses blessures lui coûte, les mouvements vers la guérison étant lestés d’un poids émotionnel insoutenable. Ce dernier s’exprime dans des passages comme : « Je dépose mes larmes, ma colère, mon pardon, tout ce qui me pèse… ». Cette phrase incarne l’incapacité à avancer librement, chaque pas étant chargé de regrets et de douleur non résolue. De la même manière, la citation « Je ne sais plus qui je suis quand je m’effondre dans ces draps mouillés de larmes » révèle une narratrice brisée, luttant pour maintenir un semblant de contrôle face à une souffrance dévastatrice. Les larmes, omniprésentes dans ce début, symbolisent un épuisement émotionnel intense. Ici, il ne s’agit pas seulement de renaître, mais de survivre à un effondrement intérieur qui semble inéluctable.

« Premiers pas » n’est pas encore un début de guérison serein, mais plutôt une étape où la douleur continue de dominer : la persistance des blessures rend le chemin vers la résilience plus incertain, difficile à entrevoir.

« Trébucher » : l’inéluctable confrontation avec la douleur

Dans « Trébucher », la narratrice affronte la réalité selon laquellela guérison n’est jamais linéaire. Les avancées, bien que réelles, sont aussi marquées de chutes inattendues. « Je me pardonne pour les crises, l’anxiété et les cris » écrit-elle, en admettant l’inévitable retour de l’angoisse et de l’autosabotage. Ce qui semblait être une progression devient soudainement réversible, et l’échec prend une place prédominante.

Cette phase montre combien la douleur refait surface dans les moments les plus inattendus. Les chutes, bien que douloureuses, ne sont pas perçues comme des régressions totales, mais comme une part essentielle du processus. Bilisari met en lumière le paradoxe d’une guérison qui n’est jamais complète, où chaque trébuchement rappelle la fragilité de la reconstruction. Pourtant, la narratrice accepte ces moments comme des leçons nécessaires : « Je refuse de renier ce que j’ai traversé. » La lutte contre l’oubli est constante, et la chute devient ainsi un acte de résistance face à la tentation de nier l’ampleur de la douleur passée.

Il ne s’agit pas seulement de renaître, mais de survivre à un effondrement intérieur qui semble inéluctable.

« Se relever » : lente guérison 

Dans « Se relever », la narratrice entame une forme d’anabase déterminée vers la réconciliation avec elle-même. Ce chapitre est ainsi paré ...