Dans Insatiable, son premier roman, Claire Von Corda explore le sexe comme un moyen d’échapper à un quotidien vide de sens. Sorte de Joseph Ponthus du cul, l’autrice nous embarque dans un univers biblique underground dont le rythme alterne volontairement entre l’ennui et le désir irrépressible.

Dans un entretien sur Zone Critique, pour la parution de son deuxième roman, Obsessions, Claire Von Corda expliquait sa démarche d’autrice de livres pornographiques de manière simple : « Bien qu’il s’agisse d’amener au-delà dans des réflexions plus poussées, le principal but est de communiquer l’envie de la masturbation ». Dans Insatiable, elle mêle l’utile à l’agréable avec un personnage principal aliéné par un travail abrutissant et une maîtrise du rythme de son histoire.
Le livre s’ouvre par une scène où la narratrice se masturbe face à la caméra de son ordinateur devant une audience d’internautes électrisés et vulgaires. Le lecteur, lui aussi, écarquille les yeux, tout juste installé dans son fauteuil. Les termes sont crus, explicites. Il n’y a pas de circonvolution ou de lyrisme inutile. Il s’agit d’ailleurs de la difficulté majeure pour décrire les rapports sexuels en littérature. Trop de poésie rend la scène ridicule, trop de grossièreté et l’excitation s’envole. Claire Von Corda parvient à trouver la juste dose d’obscénités avec un ton direct et des clichés liés au désir bien choisis.
En plus d’aliéner, le travail abîme le corps et musèle le désir
Passés les premiers émois, Claire Von Corda déploie une intrigue contemporaine où le travail est vide de sens et la dépression guette le personnage principal. Ainsi, la narratrice accepte le poste d’approvisionneur/livreur dans un supermarché situé au milieu de ces zones commerciales grises et sans âme à la sortie des centres-villes. Ces passages rappellent la violence décrite par Joseph Ponthus dans À la ligne, où il racontait son quotidien d’ouvrier intérimaire. En plus d’aliéner, le travail abîme le corps et musèle le désir.
Passés les premiers émois, Claire Von Corda déploie une intrigue contemporaine où le travail est vide de sens et la dépression guette le personnage principal
« Avec la fatigue qui pollue, l’envie de dormir à dix-neuf heures, les courbatures, la dépression et les raideurs, une immense flemme sciait mes jambes et mes envies. Dans la copie de copie du réel, dans le réveil des anxiétés, j’avais besoin d’une pré...