La nuit quand je te gratte le dos est le récit de l’effritement progressif d’une relation amoureuse, ses espoirs, ses tendresses, ses renoncements. Au risque parfois de laisser le lecteur à distance, François Bétremieux parvient à rendre dans ce texte poétique la lente usure du temps et la tragédie du quotidien qui mène à la séparation.

Le livre est là depuis quelques jours, sur le bureau, et son titre accroche à chaque fois le regard : La nuit quand je te gratte le dos, promesse d’un texte à la fois surprenant, intime et décalé. Un matin, on ne résiste plus, on finit par ouvrir le livre pour savoir de quoi il retourne. Se dévoile alors le récit d’une relation amoureuse au travers d’une situation répétée chaque soir : gratter le dos de celle qui partage sa vie, en lui racontant une histoire jusqu’à ce qu’elle s’endorme. Belle trouvaille que ce titre-refrain, qui revient identique ou presque tout au long des pages de prose poétique de François Bétremieux. Une berceuse, une routine à l’image de la relation qui s’enlise peu à peu et qui constitue le cœur du texte.

Un ami du couple

Au départ, il y a la rencontre, les soirées étudiantes, les trajets en bus et la fougue de deux étudiants qui se découvrent. Il y a ces situations vécues du début de la relation, que l’on ne pense généralement pas à écrire mais qui n’échappent pas à l’acuité de l’auteur : les lapsus dans le prénom du ou de la partenaire, les souvenirs que l’on croyait communs mais qui ont été partagés ailleurs, l’entassement des sous-vêtements de l’autre comme premiers témoins d’une vie de couple. On se prend à sourire de ce peu de chose, nostalgie attendrie d’une relation que l’on sait vouée à l’échec.

Gratter, ce n’est pas uniquement caresser, c’est également irriter, c’est aller plus profondément, au risque de rouvrir de vieille blessures.

Passés ces premiers moments, on sent pourtant parfois poindre le risque d’un texte qui laisserait le lecteur à l’écart de ce qui se dit, comme un ami du couple auquel on imposerait des détails trop personnels pour y trouver un véritable intérêt, ou des allusions trop floues pour les comprendre entièrement. Le ton direct et sans fioritures de cette première partie, malgré quelques belles nuances (« Tu te noies dans les failles de l’autre / Tu me regardes droit dedans ») ne concoure pas à atteindre un second niveau qui permettrait de se détacher de ce contexte particulier : « Stalingrad-Jaurès / Ça pue un peu la pisse », « Chez moi toute la promo / Danse et boit », « Je me revois dans cette classe / Néons allumés / Tables en U »

Un lent effritement

Il faut poursuivre, car le récit prend réellement sa force avec le délitement de la relation. L’écriture se fait à la fois plus intime et plus universelle, dans la douleur du détachement subi, de l’impuissance de deux vies qui s’éloignent, les échos profond de la perte à venir. On comprend alors que le grattage de dos n’est ...