Une grande maison à la campagne : l’apparence du calme. Les fleurs dans le jardin, sur la terrasse, les après-midisoù l’on boit du thé, et l’apparente entente de plusieurs générations. Communion réelle ou arrangements de surface ? Dans un texte cruel, où les souvenirs n’ont rien d’une madeleine de Proust, Valentine Deprez dit la terreur de l’enfance, d’un secret de famille trop longtemps enfoui. 

Ça commence par une grande maison bourgeoise à la campagne, les fleurs dans le jardin, les après-midi pluvieuses durant lesquelles on ne peut pas sortir et dont on profite pour boire le thé, les discussions familiales sur la terrasse qui regroupent plusieurs générations, les disputes, parfois, entre les grands-parents pour une histoire d’assiette un peu trop remplie, les débats sur l’Art, le Bon goût en termes d’ameublement, les artistes injustement méconnus… Et puis, bien sûr, longtemps je me suis couchée de bonne heure, le supplice du coucher qui prend racine dès l’après-midi et tenaille jusqu’au soir, l’attente fiévreuse du baiser de la mère, son goût toujours un peu trop court quand à peine arrivée elle doit déjà repartir vers ses obligations familiales.

L’histoire commence comme ça, mais n’a pas l’odeur de la madeleine trempée dans le tilleul ni la douceur des samedis d’été à lire tranquillement au pied d’un arbre.

Non, cette histoire a l’odeur des corps moites et puants, l’odeur de la violence, des mains sales et poilues qui caressent le corps nu et tremblant d’une enfant, l’odeur des dimanches matins rythmés – alors que les discussions vont bon train dans le salon – par le viol dans la chambre.

Longtemps je me suis couch...