Dans cette chronique satirique, l’écrivain Alexandre Galien s’intéresse aux activités estivales de notre premier ministre, François Bayrou. Un texte mordant et jubilatoire !

Il n’y a que peu de raisons de passer dans le 7ème arrondissement de Paris. Une panne de métro, une nuit passée sous les mansardes d’un immeuble haussmannien, un pari perdu ou des aïeux friqués. Cependant, lorsque nos pas nous y mènent, on voit immanquablement – et ce onze mois sur douze, quelques petites lucarnes qui scintillent sur les façades des ministères. Ce sont les bureaux des conseillers et des directeurs de cabinets esclaves de lignes budgétaires chiantes comme une pluie dominicale sur Châteauroux. 

Ou celui de la plume rédigeant le discours d’ouverture du salon du camping-car, qui se tient chaque année depuis dix-sept ans au Palais des congrès de la circonscription de son ministre de tutelle. Discours dont il lui a fait refaire huit fois les premières phrases « cruciales, tu comprends ? » ; on commence souvent avec une citation d’un auteur que le « M » (comprendre « le ministre » dans le jargon) n’a jamais lu. 

« Qu’a dit Yourcenar sur les caravanes ? » « Est-ce que Romain Gary n’aurait pas fait l’éloge du mobil-home dans Les enchanteurs ? » Puis, l’heure se faisant tardive : « je pense que si je lui calais Brasillach à ce connard, il ne s’en apercevrait pas. On serait tous au chômage et le pays serait débarrassé de ce sac à vin libidineux qui a refait sa toiture grâce à un rond-point aussi utile qu’un tapis de yoga à Gérard Depardieu ». Bon petit soldat, la plume se reprend et cale un petit Paulo Coelho des familles, sacrifiant sa dignité mais sauvant son job. 

Onze mois par an, tous les ans, comme le salon du camping-car. Comme le septième jour Dieu se reposa, le douzième mois, tous les conseillers ministériels font transhumance vers le Cap Ferret. Ils troquent les costumes Anthony Garçon pour un polo et un short pastel, les pompes de chez Bexley pour – selon l’âge ou la couleur politique – des Birks ou des Tod’s. 

C’est ainsi depuis la nuit des temps, l’année parlementaire comme une lente agonie, avec la fin des sessions début juillet, le budget qui fait hurler l’opposition vers le 10 et, comme grand final le 14, le discours du PR qui évoque une « année particulièrement difficile ». Pour en parler, il arbore un air grave, après avoir invité au défilé un chef d’état plus ou moins autoritaire qui se tâterait à prendre des Rafales toutes options en LOA. Pour une fois, il a raison. 

Nous sommes début août, et en parcourant la rue Saint-Dominique, la rue de Grenelle ou le Boulevard Saint-Germain, on voit briller à travers les fenêtres qui ont connu l’Empire des lampes halogènes ou des lustres à la lu...