Pour Bill Murray, un jour sans fin, c’est déjà longuet. Alors imaginez deux minutes sans fin… Pourtant habitué à ce type de scénario, le cinéaste Junta Yamaguchi tombe dans tous les écueils du film sur des boucles temporelles. Répétitif, voire laborieux, En boucle ouvre des pistes de moins en moins captivantes et privilégie finalement à l’absurdité grinçante une mièvrerie décevante. De cette éternelle journée, éprouvante pour les personnages comme pour les spectateurs, on ne voudrait garder que les premières minutes, jouissives.

Un an après Comme un lundi de Ryo Takebayashi dans lequel les employés d’un journal revivaient éternellement leur semaine de boulot un poil aliénante, une nouvelle comédie nipponne reposant sur une boucle temporelle arrive dans nos salles. Son réalisateur, Junta Yamaguchi deviendrait presque le spécialiste du genre tant son nouveau film recycle les thèmes du précédent, au titre évocateur : Beyond The Infinite Two Minutes. Dans En boucle, même principe ; employés et clients d’une sympathique auberge traditionnelle se retrouvent enfermés dans les deux mêmes minutes. Au menu : crises de nerf, hypothèses scientifiques farfelues et remises en question existentielles.
Alors que la première salve de paradoxes temporels ouvrait des perspectives scénaristiques mordantes, le film choisit de les fermer pour s’enfermer dans une solution guimauve…
Haut les cœurs les travailleurs !
Or, les premières séquences d’En boucle laissaient présager un humour des plus grinçants. En effet, le choix formel décidé par Junta Yamaguchi n’est pas sans ironie. Avec cette image ouatée pas loin de celles des dramas les plus niais, le réalisateur caricature lui-même son auberge nippone en havre d’harmonie et de douceur. Les employés en tenue traditionnelle incarnent les stéréotypes les plus attendus sur l’extrême politesse supposée des Japonais jusqu’au moment où, coincés dans les boucles, la patronne se rend compte qu’il est possible de tirer profit de la situation. Alors, les mains polies et affairées doivent travailler deux fois plus vite, sous le joug d’un poing levé.
Cette critique discrète de la résilience se double d’une dénonciation ironique de la condition de salarié. Même dans les situations les plus terribles, les employés de l’auberge se doivent de rester dociles et aimables. Passées quelques logiques crises de larmes, les serveuses se ressaisissent, se retroussent les manches, et s’occupent des clients. Quitte à réchauffer cinquante fois la même bouteille de saké. Avec le sourire, bien sûr. Mais quid des pauses au travail quand une journée dure éternellement ? Elles ne seront accordées qu’à demi-mot, lors des mouvements de panique. De plus, les employés deviennent de plus en plus efficaces à chaque nouvelle journée. Chacun sait d’où il redémarre sa boucle, quelle mission il doit opérer, vers quel client courir d’abord, quel...