L’incroyable siège du Parti communiste, construit par Oscar Niemeyer, a ouvert ses portes à Marie Calmettes et Rodolphe Perez de Zone Critique pour une superbe visite sous la tutelle de Guillaume Roubaud-Quashie, directeur de la Maison Elsa Triolet-Aragon, et avec l’amicale présence d’Olivier Barbarant, de l’exposition hommage à Aragon, « Les Adieux », comme le dernier recueil paru en Poésie / Gallimard ; une exposition à voir jusqu’au 11 janvier 2023, à l’Espace Niemeyer, 2 Place du Colonel Fabien, dans le 19e arrondissement de Paris.
De ces adieux qui eurent lieu un 28 décembre 1982, où le peuple de France se couvre d’un visage de chagrin, où l’on croise la boulangère et le Ministre, le jeune adolescent de 16 ans qui gardera chevillée au corps la parole du poète et Gréco ou Ferrat dont la voix résonne encore. C’est dans un singulier espace – singulier de son histoire comme de sa beauté – qu’on circulera, émus et troublés. Pensée en deux axes, l’exposition inspire ce sentiment d’une permanence de la présence du poète. Là les hommages de cette foule, ce 28 décembre, photographies d’anonymes, films amateurs,… ici des œuvres en échos, qui viennent glorifier, parodier, contourner ou simplement évoquer Aragon, rappeler qu’il parle encore, inspirant et oeuvrant autant dans la poésie que dans l’art plastique.
Les pièces exposées communiquent avec une poésie minutieusement choisie, d’Aragon lui-même, de Jean Ristat ou encore d’Olivier Barbarant, des vers qui à leur tour mettent en valeur ces très belles archives, issues notamment du fonds photographique de l’Humanité, que conservent les Archives départementales de la Seine-Saint-Denis, et la Maison Elsa Triolet-Aragon.
C’est l’intimidant visage chaleureux du poète qui accueille le quidam, avec l’œuvre d’Alain le Yaouanc, sur qui Aragon avait écrit en son temps. Et puis se mêlent les œuvres, anciennes, ou pensées spécialement pour l’exposition. Et alors s’attarder devant la mélancolie de ce film anonyme et muet – romance sans parole du temps de l’hommage – qui tourne en boucle, offrant alors le hasard d’une rencontre avec ces inconnus autour du cercueil. Et là ce confessionnal intimiste derrière le rideau qui rejoue la porte d’entrée de cette hôtel de la rue de Varenne, que louait le poète à la fin de sa fin. Où découvrir alors les paroles d’Antoine Vitez ou de Jean Ristat, dans l’appartement d’Aragon. Et puis la beauté du portrait où se dissipe ce visage du poète sans ne rien perdre de sa présence, signé Ernest Pignon Ernest, les œuvres de Mireille Glodek Miailhe ou de Gianni Burattoni, cette troublante Stèle bibliophage qui porte avec elle toute une histoire littéraire du poète Jean-Luc Parant, et bien d’autres œuvres, autour ou à partir du poète disparu.
Une exposition d’une délicatesse heureuse, qui nous invite à l’errance émue, perpétuant la présence du poète et la présence, surtout, de notre attachement à lui.