Paru aux éditions de l’Iconoclaste le 21 août dernier, La Bonne Mère signe le premier roman de Mathilda di Matteo. Un texte rafraîchissant dans lequel l’autrice d’origine marseillaise dresse le portrait d’une relation mère-fille aussi explosive que bouleversante, où se mêlent conflit, réconciliation et réparation. Un récit intime et éminemment contemporain qui parvient à tirer son épingle du jeu dans une rentrée littéraire déjà saturée. 

Sur les étals des librairies, le premier roman de Mathilda di Matteo détonne au milieu des mastodontes de la littérature française. Sa couverture flamboyante, aux allures de bande dessinée tranche avec l’austérité des grandes maisons d’édition où sobriété et homogénéité sont les maîtres mots. Une illustration qui attire l’oeil et qui ne doit rien au hasard. Dessinée par l’artiste multidisciplinaire Marie Mohanna, cette première de couverture n’est autre qu’une allégorie de l’héroïne du roman, Véro et de sa ville natale, Marseille. Inspiré de faits réels, La Bonne Mère retrace les destins croisés de Clara, une jeune Marseillaise « montée » à Paris pour étudier la sociologie à Science Po et de sa mère Véronique, une femme à la personnalité marquée, qui voit sa fille changer et peu à peu s’éloigner d’elle. Lorsque cette dernière revient dans la cité phocéenne le temps d’un week-end, c’est pour lui présenter son petit-copain, Raphaël, un pur produit parisien. Immédiatement, Véro déteste tout de lui : sa façon de s’habiller, de s’exprimer, de se mouvoir. Elle l’appelle le « girafon », en référence à sa silhouette élancée et son long cou. Une rencontre cocasse entre deux mondes que tout oppose, point de départ d’un récit qui met en scène, avec humour et tension, le choc des cultures et des classes. 

De Marseille à Paris : itinéraire d’un antagonisme marqué 

Tel un caméléon, Mathilda di Matteo propose un roman à deux voix, dans lequel mère et fille se livrent tour à tour. Au fil de cette narration croisée, le lecteur découvre le personnage haut en-couleur de Véro. Une cagole perchée sur pilotis, aux ongles peinturlurés et au décolleté échancré. Une femme exubérante et sensuelle, dotée d’un franc-parler à faire frémir les conducteurs de la rue Saint-Fé. Véro est l’allégorie même de Marseille qu’elle se plait à personnifier : « C’est une copine, ma ville. Disons une belle brune mate sur pilotis qui danse le MIA dans un bar du port […] Elle se déhanche les yeux fermés, maquillée comme une voiture volée ». Face à elle, Clara, plus réservée et plus cérébrale, montée à Paris pour y gagner une forme d’ascension sociale. C’est l’antithèse même de sa mère, tant sur le plan vestimentaire que dans le caractère. Une néo 

parisienne qui s’est évertuée à assimiler les codes, le langage et les postures d’un univers élitiste, jusqu’à séduire son parfait représentant : Raphaël. Un trentenaire de bonne famille, entré en politique par l’intermédiaire de son père. Un « spécimen racé » auréolé d’intelligence et de savoir-vivre. Quand la cité phocéenne déborde de couleurs, d’odeurs, de voix et de gestes amples, la capitale se veut maîtrisée, tempérée, implicite. Véro incarne le soleil, Raphaël la grisaille et Clara se retrouve tiraillée entre deux mondes irréconciliables. Alors comment s’affranchir sans trahir ? 

“Derrière l’humour et la légèreté apparente, Mathilda di Matteo explore avec subtilité les multiples visages de la viol...