Retrouvez tous les deux mois, la sélection par notre équipe du meilleur des dernières sorties littéraires.
– Premier roman –
Arthur Larrue, Partir en guerre, Allia, 125 pages, 6.20 euros
« J’aime les femmes qui ont de la révolution dans l’âme et du muscle dans le cul ». Un jeune homme en peine d’amour déambule dans les rues désolées de Saint-Pétersbourg, et fait la connaissance du truculent groupe de jeunes anarchistes Voïna, qui signifie Guerre en Russe. Leurs faits d’armes : l’organisation d’une partouze improvisée au musée national de biologie, et le tag d’un phallus géant sur le pont Lityeni de Saint-Pétersbourg. Dans ce court roman déjanté et joyeusement bordélique, défile une galerie de personnages tous plus fêlés et attendrissants les uns que les autres, sur fond de contestation désabusée du pouvoir poutinien. Le coup de cœur de notre rédaction.
– Roman français –
Hoai Huong Nguyen, L’ombre douce , Viviane Hamy, 156 pages, 15 euros
En 1954, alors que la guerre d’Indochine touche à sa fin, Mai rencontre dans un hôpital militaire Yann, jeune soldat breton blessé à la poitrine. La passion surgit alors et emporte les deux amants, mais bien vite, Mai, qui s’insurge contre sa famille qui l’a promise à un autre, se voit rejetée et bannie. A peine marié, et alors que la défaite française survient, Yann doit prendre le chemin, en compagnie de quelques milliers d’autres prisonniers, des camps d’internements,desquels Mai va tout faire pour le sauver. Cet histoire d’un amour fragile dans le Vietnam d’hier, embarqué dans le grand vent de l’Histoire, est dépeint avec grâce et pudeur par Hoai Huong Nguyen, dans une langue à la fois précise et poétique.
– Roman étranger –
Herman Bang, Ida Brandt, Phébus, 320 pages, 22 euros
Après Mikaël et Les quatre Diables, les éditions Phébus poursuivent la publication des œuvres d’Herman Bang, l’une des personnalités les plus fascinantes de la littérature danoise, que Claude Monet considérait comme le premier des impressionnistes. Dans Ida Brandt, l’auteur affirmait vouloir « exprimer par les mots la douleur de ceux qui ne se plaignent pas » : c’est chose faire avec ce superbe portrait d’une femme dévouée et innocente, riche héritière qui pourtant passe ses journées à s’occuper de malades dans un asile. Rejeté par la bourgeoisie danoise par son altruisme, elle le devient également par ses collègues infirmières pour sa richesse. Ida Brandt éprouve des difficultés à trouver sa place dans la société, jusqu’à ce que l’amour fou, l’amour superbe, celui qui déborde tous les préjugés, la terrasse enfin. C’est dans une langue quasi cinématographique, puissamment moderne, qu’Herman Bang nous donne à lire la chute terrible de son héroïne…
– Sortie Poche –
Donald Ray Pollock, Knockemstiff, Libretto, 245 pages, 9.10 euros.
Après avoir travaillé 40 ans dans une machine à papier située près de la ville –désormais fantôme – de Knockemstiff, Ohio, Donald Ray Pollock décide d’aller à l’Université et se met à écrire. Son dernier roman, Le diable tout le temps, paru l’année dernière, vient de recevoir le prix RTL-Lire du meilleur livre de l’année. Knockemstiff, son premier recueil de nouvelles, narre les errances crépusculaires et désespérées des habitants de cette ville maudite qui donne son titre à l’ouvrage. Le gosse violeur de poupées, le père qui bourre son fils de stéroïdes pour retrouver sa gloire passée de body-builders,… : ainsi sont les personnages de de Pollock, ramassis de laissés-pour-compte terriblement attendrissant, perdus dans les confins silencieux de l’Ohio. Il y a du Ellroy dans ce premier recueil.
– Livre Audio –
Jean-Christophe Rufin, Le grand coeur, Gallimard, 23.65 euros.
Il se prénomme Jacques Cœur, et fut l’un des hommes les plus puissants du Royaume de France, sous le règne de Charles VII, au XVè siècle. Dans une langue classique et maîtrisée, Jean-Christophe Rufin nous fait découvrir, sur plus de 14 heures d’écoutes, l’extraordinaire destinée de cet homme des lumières égarés dans les affres obscures du Moyen-Âge tardif, et qui mit la France sur les rails de la modernité. Explorateur hanté par le voyage qu’il fit au début de sa vie en Orient, Marchand-négociant visionnaire et talentueux, il fut l’un des premiers à établir des relations commerciales avec les pays du Levant. Devenu l’un des hommes les plus riches du royaume, la chute de cet humaniste sera à la mesure de son extraordinaire réussite…Captivant de bout en bout, la magie opère.
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