Il pleut sur les Tuileries et l’eau mouille le bas de mon costume. Le vent manque à tout instant de renverser mon chapeau. Ce n’est pas un temps pour les piétons. Pourtant, dans le grisâtre qui tombe sur Paris comme une chape de plomb, une lumière bleue au loin apparaît à travers les vitres du hall de l’École du Louvre. C’est le Morellet qui m’appelle, celui qui fait son entrée à l’École du Louvre grâce à la générosité du mécène Majid Boustany. Pressons le pas.

L’École du Louvre à l’heure contemporaine.

π barroco n°2 bleu, 1=45° (angles du même côté), 7 éléments, car tel est le titre de l’œuvre de François Morellet, et La Marseillaise du sculpteur César rejoignent les deux sculptures d’Anthony Gormley, d’un chevalet et d’une photographie de Francis Bacon, portant la collection contemporaine à six œuvres, fruit du don du mécène Majid Boustany.

Tout cela s’inscrit dans cette volonté de donner une dimension contemporaine à l’école du Louvre qui doit être en continuité avec son temps. Les travaux réalisés dans le cadre du projet « Ecole du Louvre 2021-2022 » ont permis la réalisation du magnifique hall Jaujard en chêne clair et en pierre de calcaire beige, de la rénovation de la bibliothèque dans laquelle trônent Witness VIIWitness VIII de Gormley, d’un centre de recherche, d’une cafétéria et du service informatique et documentaire. Lorsque l’on entre par le hall Jaujard, l’on a l’impression de grandeur et l’on sent l’aura qui entoure cette école de renom. L’impulsion contemporaine est un nouveau souffle et engage de très belles choses à venir comme l’a formulé la directrice de l’école, Claire Barbillon.

L’œuvre de François Morellet, monumentale, s’inscrit merveilleusement bien dans ce hall. La lumière des néons bleus se reflètent dans la surface vitrée à l’opposée de la galerie et crée un jeu de lumière absolument remarquable. Morellet est un artiste qui s’inscrit dans le mouvement américain des années 60 Light and Space qui réfléchissait sur l’incidence de la lumière sur le support et l’espace ainsi que sur les phénomènes de perception. L’œuvre π barroco n°2 bleu, 1=45° (angles du même côté), 7 éléments,de forme géométrique repose sur une application mathématique. Les demi-cercles de néon bleu s’entrecroisent selon le système mathématique pensé par Morellet.

Puis, niché dans un coin du hall Jaujard, une œuvre de César trône. La Marseillaise, bustes en bronze, fait le lien entre le passé et le contemporain. J’écris « bustes » au pluriel, car il y a deux têtes soudées l’une à l’autre. Non, ce ne sont pas des siamois, mais un collage de deux visages : l’un appartenant à la Renommée du sculpteur du XIXe siècle François Rude et l’autre à celui de l’artiste lui-même qui s’amuse de ce dialogue des genres.

Ces deux artistes à l’École du Louvre font sens pour deux raisons. La première est que l’École du Louvre ouvre de nouveaux cours dédiés à l’art contemporain. La seconde est que le musée du Louvre accueille déjà une œuvre de Morellet et une œuvre de César. En effet, dans l’escalier monumental Lefuel de l’aile Richelieu, des vitraux de Morellet y figurent. De même, une sculpture de Morellet s’élève dans les Jardins des Tuileries. Jamais deux sans trois donc ! Quant à César, une de ses compressions est exposée au Café Richelieu dans l’aile Richelieu du musée du Louvre.

La Francis Bacon MB Art Foundation

Francis Bacon, CARCASS OF MEAT AND BIRD OF PREY,
Oil and dry transfer lettering on canvas, 198 x 147 cm, 1980.

L’Ecole du Louvre doit ses rénovation à cette fondation philanthropique à but non lucratif. Le souhait principal de cette fondation, créée par Majid Boustany, est de diffuser plus largement l’œuvre de l’artiste Francis Bacon afin d’en avoir une meilleure compréhension à travers la réalisation d’expositions, de films ou de thèses de recherche.

Outre cette volonté pédagogique et universitaire, la fondation soutient, en tant que mécénat, l’Ecole du Louvre et le musée du Louvre pour lequel a été créé un fond de dotation réservé à la restauration des oeuvres que Francis Bacon admirait et dont certaines furent une source d’inspiration comme Œdipe explique l’énigme du sphinx d’Ingres ou encore Le Bœuf écorché de Rembrandt.

La Fondation encourage par ailleurs la recherche en art en attribuant des bourses de recherche à l’Ecole du Louvre et de création à la villa Arson.

Ainsi, c’est un des acteurs culturels les plus importants qui permet la rentrée de Morellet et de César à l’Ecole du Louvre. La Fondation s’est donné un rôle de conservation du patrimoine français et sa diffusion au sein de l’espace public afin de rendre l’art accessible pour tous.

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Cette inauguration montre que l’art contemporain arrive petit à petit dans nos instances publiques et qu’il est fondamental qu’un dialogue entre les époques se réalisent afin de construire un meilleur avenir. Le mécénat de Majid Boustany est remarquable, car il est ambitieux, mais surtout pédagogique, car la Francis Bacon MB Art Foundation comprend aussi une partie d’accompagnement et de soutien aux artistes et aux chercheurs.

Crédit photo : © Majid-Boustany