Avec leur premier long métrage, Marie-Hélène Viens et Philippe Lupien ambitionnent de marier comédie romantique et science-fiction intimiste. Mais entre gadgets néon et romance grise, Vous n’êtes pas seuls illustre surtout la difficulté d’accorder deux genres que tout oppose. Derrière la fable existentielle promise, un film en quête de sa propre cohérence.

Vous êtes-vous déjà demandé ce que vous feriez face à un extraterrestre à l’agonie ? Léo, lui, connaît déjà la marche à suivre : sortir son ukulélé et jouer de la variété canadienne péniblement apprise au prix de longues heures solitaires passées devant des tutos YouTube.

Dans sa solitude obstinée, Léo (Pier-Luc Funk), livreur de nuit dans la pizzeria de ses parents et grand blessé du cœur, croise le chemin de John, un mystérieux chauffeur de taxi à l’œil vitreux. Ce dernier se révèle être un extraterrestre humanoïde en mission sur Terre pour faire disparaître des humains esseulés. Alors que Léo fait la rencontre de Rita, une nouvelle muse providentielle, John se met à le suivre à la trace de manière inquiétante…

Après dix ans de réflexion et de travail, Marie-Hélène Viens et Philippe Lupien, révélés par leurs courts métrages décalés (notamment Bernard le Grand, 2013, et Amen, 2016), passent finalement du court au (trop) long métrage. À travers le récit d’une chasse à la solitude, Marie-Hélène Viens et Philippe Lupien semblent vouloir interroger notre besoin universel de connexion, et montrer qu’entre l’extra et le terrestre, il n’y a parfois qu’un vertige commun : la peur d’être seul. Si le pitch pourrait nous projeter dans l’univers d’un Taxi Driver québécois sur fond de science-fiction, la réalité est plus proche de la romance atone sur fond de SF timide.

Réalité augmentée

Vous n’êtes pas seuls s’inscrit d’abord dans une filiation assumée. À naviguer entre les références d’un certain âge d’or de la science-fiction expérimentale, le film cultive une esthétique kitsch qu’il tente de remettre au goût du jour. La beauté formelle des flashs et néons empruntée à Rencontres du troisième type (Spielberg, 1977) convoque la même ambiance abstraite au service d’une morale commune : se laisser porter par la fascination de l’autre et de l’inconnu. À cet emprunt s’ajoutent rapidement des échos à la romance contrariée de Punch-Drunk Love (Paul Thomas Anderson, 2002) ou encore un clin d’œil potache au chapeau repousse-alien en aluminium de Signes (Night Shyamalan, 2002).

À travers cette mosaïque s’exprime un amour sincère pour la culture populaire. Mais à trop miser sur ce matériau hérité, Vous n’êtes pas seuls se montre trop timide et son imaginaire sorti...