Squid Game, loin de n’être qu’un divertissement, se montre riche en questionnements philosophiques, sociologiques et politiques, à l’heure où les démocraties libérales se heurtent à de nombreuses crises de société.

La deuxième saison de la série dystopique sud coréenne Squid Game, avec 126 millions de visionnages lors de ses 11 premiers jours de diffusion, est un succès planétaire. Dans cette série, un groupe d’individus masqués organise un jeu d’argent pour le divertissement d’une poignée d’hommes riches. 456 personnes en situation personnelle et financière critique sont ainsi démarchées dans les couloirs du métro de Séoul. Seong Gi-hun, comme les 455 autres candidats, rejoint alors le jeu. Le principe est simple : à chaque tour, les joueurs qui ne respectent pas les règles sont éliminés – au sens propre du terme : ils sont exécutés ; le gagnant remporte la somme de 45 milliards de wons, soit à peu près 33 millions d’euros.

Squid Game : une série philosophique ? 

Derrière la fragilité des décors en carton, derrière la légèreté de la valse qui accompagne les participants jusqu’aux jeux, derrière l’évidence surtout, de la violence posée comme élément central de Squid Game, la série invite le spectateur à se questionner sur des enjeux de philosophie politique extrêmement contemporains. 

Squid Game propose en effet une réflexion sur de nombreux sujets relatifs au fonctionnement des démocraties libérales : le rôle du libre arbitre et du libre choix comme outil de responsabilisation des individus, ou encore le mythe d’une méritocratie fondée sur l’égalité parfaite des participants face aux jeux. 

L’épisode 1 de notre série montre que la puissance des déterminismes invalide la possibilité du libre arbitre. Ainsi, les participants n’ont pas d’autre choix que de participer et donc de finir exécutés. 

L’épisode 2 revient sur la notion de méritocratie. La série semble promouvoir une certaine égalité entre les participants, qui est également illusoire. Ceux-ci sont, en effet, valorisés par des compétences acquises a priori

Que faire donc lorsqu’un mode de fonctionnement repose sur des règles inefficaces et inégalitaires ? Dans Squid Game, à l’exception d’un joueur désespéré, personne ne s’essaie à l’évasion. Il faut attendre la saison 2 pour que germe l’idée d’une révolte. C’est l’objet de notre dernier épisode qui analyse la seule façon possible de se révolter : par la violence.

Le pacte de responsabilité de Squid Game

Squid Game, loin d’inviter le public à s’asseoir passivement et à assister à un divertissement violent, construit donc un “Pacte de responsabilité” – pour reprendre l’expression de Sartre – entre la série et les spectateurs, de la même manière que les livres et les films. Pour être responsables, les spectateurs doivent être en mesure de se promener derrière les décors en carton, derrière la Valse de Strauss, derrière les balles qui pleuvent dans les cours de récréation. 

Voilà l’objet de ce dossier. À celles et ceux qui seraient restés coincés dans le dortoir de Squid Game, les articles qui suivent se proposent de leur prendre la main. En un mot : de leur faire découvrir l’envers du décor, et l’arrière-plan philosophique et politique de la série.