épisode 1 : La bienveillance, poison du peuple

Les rentrées se ressemblent. Des métros qui se bondent, des listes de fournitures scolaires, des changements de maîtresses, des enfants qui ont un nouvel enseignant… Les mails qui s’accumulent, les étals des libraires remplis de quelques futurs prix littéraires et de beaucoup de noms d’auteurs qui, d’ici six mois, pesteront contre l’équipe marketing de leur maison d’édition qui « n’a pas été assez créative ». Reproche que l’on peut sans doute aussi faire à notre gouvernement démissionnaire. Ils n’ont pourtant pas manqué d’envie en matière de créativité, le garde des Sceaux au premier chef, qui a décidé de faire d’une école de la haute fonction publique un endroit où la laïcité n’a plus cours, se mouchant à la fois dans le texte de la loi de 1905 et dans des oripeaux traditionnels.
Le 8 septembre, un gouvernement qui chute comme l’enfant potelé que j’étais d’une balançoire branlante. Et, deux jours après, un week-end sous cloche à la Fête de l’Humanité. Pour nos lecteurs de droite, que je sais de plus en plus nombreux, la Fête de l’Humanité est une sorte de grand rassemblement organisé par les communistes restants, durant lequel les militants de gauche et les Parisiens branchouilles se retrouvent (les seconds tentant de se fondre parmi les premiers en portant des sapes Quechua). On y achète un pass à prix ultra réduit auprès des différentes fédérations communistes, et on peut, durant trois jours, boire de la bière, manger des merguez et des spécialités locales de toute la France (j’y ai vu un homard entier à 40 boules servi dans une assiette en plastique) tout en matant les concerts de Gims, des Ogres de Barback (chaque année, putain !) et du Saïan Supa Crew… En somme, un immense bordel, où les poings brandis sur L’Internationale sont remplacés dès 17 h par des coudes levés sur Les Corons. C’est loin, de plus en plus loin chaque année. Là, c’est Brétigny-sur-Orge, par exemple, sur une base militaire, qui accueille sans ciller un rassemblement communo-anarchiste… Et c’est bien là tout le sujet de ce billet : la gauche ne fait plus peur à la droite.
J’y ai bu quelques coups avec Louis, un musicien solitaire de 32 ans, look soigné et tignasse. Un peu grande gueule, le genre de mec qui a toujours une conversation mais qui n’est jamais barbant. Bref, un bon camarade. On se roulait une clope en regardant, autour de nous, les jeunes et les vieux, se tenant bras dessus bras dessous, les Noirs, les Arabes et les Blancs qui semblaient n’en avoir plus rien à branler d’être des Arabes, des Noirs et des Blancs ; un mec éméché qui tentait de trouver un endroit où dormir entre deux tentes, et des inconnus qui l’aidaient ; toute cette ...