Avec 7, Tristan Garcian signe un recueil de récits à mi-chemin entre la nouvelle et le roman. Il propose une réflexion sur les croyances de nos sociétés modernes. Quand la vérité frôle dangereusement le surnaturel…
« J’avais le teint cadavérique des hommes que la vérité a détournés trop longtemps du soleil » Et si nous avions besoin de croire pour vivre ? Si notre société basée sur les progrès scientifiques ne reposait que sur une simple foi en la vérité ? Certains récits de 7, comme « l’Existence des extra-terrestres », « Hémisphères », ou « Septième », mettent en scène des personnages qui risquent de disparaître s’ils se mettent à douter de leurs croyances. Dans « l’Existence des extra-terrestres », qui raconte l’histoire du dernier couple à prôner l’existence de voisins des Terriens, l’entourage de ce couple qui ne croît pas ou doute de cette thèse disparaît soudainement. Dans « Hémisphères », les quelques habitants du territoire, baptisés universalistes, car ils ne croient en aucun principe particulier, sont dénués de vitalité, errent dans une région vide. « Septième » est roman autour d’un homme dont le corps se régénère après chaque mort, tout en gardant la mémoire de ses vies précédentes. Le doute qu’il entretient sur son immortalité précipite la mort de sa femme. L’amour au fond aurait besoin de foi plus que de vérité.
« La Révolution permanente » dépeint le désenchantement d’une militante du parti communiste de longue date, alors qu’elle quitte le parti parce qu’elle ne croit plus en la révolution. Son existence devient fantomatique, au sens littéral. Le doute fait perdre ses attaches au réel.
La croyance à l’épreuve du réel
Mais ces nouvelles racontent aussi les chocs des croyances, confrontées à une certaine réalité. Le héros de « Hélicéenne » qui croit au pouvoir d’une drogue moderne de nous voyager dans les différents âges de notre vie a peut-être bien été berné.
La nouvelle « Hémisphères » présente un monde futuriste où des micro villages de croyants se sont renfermés sur eux-mêmes dans des cloches coupées des ondes et de la société connectée. Le monde qui en résulte est vide. Si la croyance apporte de la vitalité, un idéal, elle peut aussi couper de la relation à l’autre.
Le doute fait perdre ses attaches au réel
Et de la relation à soi, comme ce musicien qui croit que toutes les plus grandes musiques du XXe siècle ne sont en réalité que des imitations de mélodies originelles datant de plusieurs siècles, mélodies dont il a hérité. Mais même avec ce trésor, il n’arrive pas à composer. Un retour sur soi sera salvateur.
7 s’apparente à un recueil de contes modernes où les personnages ne croient plus totalement en leurs pouvoirs magiques. Le conte est entré dans l’ère du soupçon.
Ici, la Belle et la Bête se rendent compte que l’une ne peut pas être belle sans que l’autre soit laid, comme touchés par la malédiction d’une société où règne la concurrence, et où les gagnants entraînent forcément des perdants.
Les châteaux se sont transformés en maisons de campagne et le royaume féérique c’est la Californie !
- 7, Tristan Garcia, Gallimard, 576 pages, 22 euros, août 2015