Le Festival de Cannes a ses rituels : applaudissements à l’apparition du logo palmé, file d’attente en tenue de gala devant le stand de paninis, véritable marché noir de billets pour les projections les plus convoitées. Mais si le spectacle se situe parfois autant à l’extérieur qu’à l’intérieur des salles obscures, c’est bien nos expériences de cinéma que nous avons voulu partager avec vous. Pendant cinq jours, Zone Critique s’est laissé joyeusement dévorer par les films, les équipes et le rythme cannois pour vous transmettre, chaque jour, un condensé du plus grand festival du monde.

Un constat frustrant s’établit très vite, à Cannes : il n’y a pas assez de temps pour tout voir. Aussi faut-il faire confiance au Jury quant à la qualité et à l’importance d’Un simple accident, dernier long-métrage de Jafar Panahi. Le réalisateur de Taxi Téhéran, déjà condamné et arrêté par le pouvoir iranien pour ses films, a reçu la Palme d’Or samedi soir pour son œuvre la plus frontalement critique du régime des mollahs. Après Godard, Antonioni, Clouzot et Altman, le réalisateur entre donc au comité très sélect des cinéastes ayant réussi le grand chelem : Cannes, Venise, Berlin.
Mais le palmarès a aussi récompensé des films vus, et appréciés. C’est le cas du Prix Spécial, qui revient à Résurrection de Bi Gan, œuvre d’une belle inventivité esthétique. Au sein du long-métrage, cassé en six segments allant du cinéma muet au film apocalypse, le temps s’écoule autrement et quelque chose se suspend, laissant place au rêve.
Résurrection manque de chaleur, mais son envergure et sa mise en scène ont apporté de la hauteur à une Compétition qui s’essoufflait parfois. Si la Palme d’Or a eu des prétendants sérieux (Sentimental Value, Sirat, L’Agent Secret) et des prétendants enthousiasmants (Deux procureurs, The Mastermind, La Petite Dernière), elle a également eu des prétendants ratés. En tête de liste, Fuori, de l’italien Mario Martone qui, prenant appui sur la vie de l’écrivaine Goliarda Sapienza en retire tout le sel, ou encore The History of Sound d’Oliver Hermanus, film sympathique au demeurant, mais qui passe complètement à côté de ses thèmes pour privilégier un académisme consciencieux. On se demande franchement s’il ne s’est pas trompé de destination.
Alpha, le nouveau film de Julia Ducournau, ne fait pas partie de la même catégorie. Après avoir gagné la Palme d’Or avec Titane en 2021, la réalisatrice signe un film plus intime et ambitieux, mêlant drame familial, transmutations physiques et années sida. Malheureusement, l’entreprise se révèle trop bancale pour émouvoir.
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