Jusqu’au 16 Février, le Grand Palais accueille l’exposition Cartier dans une ambiance qui se veut feutrée et délicate à l’image des joyaux exposés. Visant l’établissement d’un parallèle entre l’Histoire avec un grand H et la marque, celle ci se transforme assez vite en une grande opération publicitaire pour Cartier ayant l’égale richesse scientifique et scénographique d’une vitrine, pour être plus claire, avoisinant zéro.
« Histoire » ou « Vanity Fair »
De cet intitulé « le Style et l’Histoire » j’attendais énormément, laissant penser à une véritable liaison qu’aurait pu dégager les commissaires entre les travaux de la Maison Cartier et l’histoire riche de la fin du XIXe siècle à nos jours, ou tout au moins à la mise en parallèle avec l’histoire de la mode qui pendant cette période est foisonnante et plus que facile à établir. En réalité rien de tout cela, le titre est-il mal choisi ou le traitement des commissaires un échec ?
Les premières salles passées, où le texte nous explique en à peine trois phrases, que Cartier prend le contre pied de l’art nouveau naissant, restant dans le néoclassicisme séduisant alors les familles russes, puis qu’il se décide enfin à passer au modernisme de l’art déco, on enchaîne sans transition avec ni plus ni moins qu’un inventaire des gros clients de Cartier. Etait-ce vraiment une réponse à la problématique historique ou une simple « foire aux vanités » servant à combler l’espace restant d’une exposition vide de sens ? Les deux ou trois robes présentes et les illustrations de Brissaud (et non pas « Brimaud », comme on peut le voir dans certains petits panneaux) pour « La Gazette du Bon Ton », la référence à une exposition universelle puis les couvertures de Vogue ne suffisent nullement à présenter ce que les commissaires présentaient comme « le style et l’histoire », nous laissant peut être (et là je suis gentille) l’espoir de toucher vaguement à une « histoire du style », la seule chronologie se trouvant dans le dossier de presse, comble pour une exposition se voulant historique.
L’exposition n’ayant aucun sens au figuré n’en a guère plus au sens propre…
Un joyau de kitsch
Les premières salles m’ont étonnamment satisfaite, nous rappelant l’ambiance d’un écrin, avec un plafond bas, une lumière tamisée,….en somme, une scénographie simple et efficace. Cependant, ces premières sections passées, on tombe dans le kitsch et le « too much » auxquels le Grand Palais nous avait habitué. En effet, les scénographes Sylvain Roca et Nicolas Grouault ont fait appel à un collectif pour réaliser ces horribles et inutiles fresques mouvantes au plafond, eux même ne sachant pas exactement à quoi cela pourrait vraiment correspondre, hésitant entre l’évocation de mondes exotiques mais aussi thématiques comme le luxe géométrique, la Café Society, la rue de la Paix, le style néo Louis XVI, la féérie des pierres, … Vous cherchez encore la cohérence ? Rassurez vous moi aussi.
On pourrait faire abstraction de ces horreurs au plafond si seulement on ne se perdait pas dans le labyrinthe incohérent des salles. Encore une fois, l’enchaînement des premières est impeccable mais arrivé au thème des inspirations étrangères, on part à l’aventure. Certains thèmes dépourvus de textes témoignant du vide scientifique ne seraient rien si au moins on comprenait dans quel sens se diriger entre terminer la deuxième partie incluse en plein milieu de la troisième partie ou commencer la troisième partie avec une éventuelle possibilité de revenir plus tard sur la deuxième partie. Imaginez vous lire le premier chapitre d’un livre, s’arrêter au milieu pour lire le dénouement puis reprendre la lecture normale.
On ne peut pas nier la beauté des oeuvres de joaillerie exposées, et c’est bien la seule raison pouvant motiver le déplacement mais je ne peux vous donner qu’un conseil, allez au musée des Arts Décoratifs puis dans la boutique Cartier vous serez mieux à même de répondre à la problématique, de votre propre chef.
Cassandre Morelle