Inspiré de son histoire personnelle et dans le prolongement de son court-métrage L’Attente, Alice Douard livre un bouleversant récit baigné de soleil, drôle et émouvant, sur l’amour et la filiation, en abordant l’homoparentalité féminine sous un jour nouveau. Une pulsion de vie brute à découvrir en salles et à l’occasion du festival Chéries-Chéris.


Le 23 avril 2013, le Parlement adopte la loi ouvrant le mariage pour toutes et tous. L’archive sonore de ce moment charnière sert de prologue à Alice Douard pour accorder le subjectif à l’universel. Le film se passe en 2016 et, à cette heure, la PMA n’est pas encore autorisée et les institutions françaises avancent doucement le matin et pas trop vite l’après-midi. Alors, si cette avancée marque une étape décisive pour beaucoup, de nombreux écueils discriminatoires s’invitent toujours à la table des foyers homoparentaux – surtout lorsqu’il s’agit de faire famille. Animée par la volonté de proposer un cinéma ample et fédérateur, Alice Douard a choisi des cinégénies irradiant d’humanité pour incarner son couple tendre. L’humour enveloppant et tout sourire de l’expressive Nadia (Monia Chokri) se conjugue à la timide mélodie interne de Céline (Ella Rumpf), dont on épouse le point de vue. L’une est dentiste et a 37 ans, l’autre, tout juste trentenaire, est DJ. Elles sont mariées, s’aiment et partagent l’expérience de la grossesse comme tous les couples. Des échographies aux séances de préparation à l’accouchement en passant par les discussions sur l’oreiller, nappées d’amour et débordant d’angoisse, chacune cherche à trouver sa place. Puis, la focale dézoome sur l’image à mesure que le sujet s’universalise. L’histoire débute avec ces femmes pour finalement questionner la parentalité au sens large : vais-je l’aimer ? Vais-je y arriver ?

“Non sans rappeler L’Histoire de Souleymane sur un tout autre sujet social, Alice Douard appuie avec douceur là où ça fait mal.”

Dans les cordes
Alors qu’elle attend son premier enfant sans le porter, Céline se renseigne sur la délicate procédure qui lui permettra d’être reconnue comme mère aux yeux de la loi. Un véritable parcours de combattante pour décrocher le sésame de co-parente commence alors. Pour construire son dossier, il lui faut réunir quinze lettres attestant de la solidité de son couple et de son lien pourtant évident avec sa fille. En veillant surtout à ne pas choisir que des copines lesbiennes pour témoins, Céline et Nadia devront donc compiler discours et preuves d’amour, comme s’il fallait prouver à la République qu’aimer peut signer filiation. Sans commettre d’impair, la cinéaste passe alors au crible tous les à-côtés, des plus intimes aux plus loufoques, en laissant place aux dialogues ponctués de finesse et d’empathie. Entre ...