Quand elle apprend qu’elle va perdre son travail, Gisèle, jeune trentenaire originaire du nord de la France et débarquée quelques années plus tôt en Bretagne, en profite pour faire le ménage dans sa vie jusqu’alors monotone. De son côté, Paul, grand brun mystérieux, se renferme chaque jour un peu plus dans la solitude du manoir dont il a hérité. Un hasard de la vie les fera se rencontrer. Si la dimension romantique du premier roman d’Isabelle Schmidt laisse peu de place au doute quant au destin des deux protagonistes, de magnifiques pages traitent avec justesse et sensibilité de l’amitié, de la maladie et de ces liens qui nous raccrochent à la vie.
« J’étais Gisèle, la petite factrice, pas foutue de garder un emploi pourtant pas compliqué. Il était Paul. Le mystérieux Paul. Le chef d’entreprise, le propriétaire de la plus grande maison de la région, celui qu’on ne questionnait jamais et qu’on observait de loin. »
Il y a de ces histoires d’amour dont on connaît l’issue avant même de les avoir commencées – tant on les a déjà entendues. Deux cœurs esseulés, blessés par la vie, que le destin va venir bousculer pour les mettre l’un en face de l’autre comme une évidence. Quelques péripéties plus tard, les amoureux sont finalement réunis autour d’une grande tablée, entourés des gens qu’ils aiment dans les rires et les souvenirs heureux. L’histoire que nous narre Isabelle Schmidt dans son roman Happée par la mer – publié aux éditions Flammarion en novembre 2024 – fait partie de celles-là, mais heureusement, pas seulement.
Dans un décor breton peint avec délicatesse, on suit le destin de Gisèle, factrice, qui décide de mettre un coup de pied dans ses habitudes lorsqu’elle découvre qu’elle va être débauchée de la poste de son village. La jeune femme décide alors de quitter son compagnon et, au rythme des marées, de faire le point sur sa vie ; au détour de longues marches sur le sable mouillé, elle se remémore sa vie passée et les choix qu’elle a pu faire, qu’il s’agisse de sa non-maternité ou de son parcours professionnel. Dans le tumulte de ce nouvel horizon, Gisèle va inévitablement croiser le regard de Paul – homme solitaire et mystérieux vivant reclus depuis plusieurs années dans un manoir pour des raisons obscures.
Dès lors, la narratrice dont l’esprit était jusque-là embrumé de doutes et de questionnements existentiels, a désormais ses pensées tournées vers Paul et l’on voit la structure narrative du roman se dérouler sous nos pieds : Place à la romance.
« Paul Morvan. Comme une chanson qui appuie son refrain sur la tempe, il n’y avait que lui dans ma tête. Paul. Sa bouche. La broussaille de sa barbe. Ses doigts veineux, accrochés à l’alcool. Sa peine braillant sans pudeur et sans voix. Paul. Paul. Paul Morvan. Qui est-il ? Quell...