Les élections américaines approchent à grands pas dans une Amérique fracturée, malmenée par les éléments autant que par les circonstances – sa situation actuelle n’est ainsi pas sans similitudes avec la Grande Dépression. C’est d’ailleurs dans ces États-Unis des années 1930 que Charles Frazier ancre Les Traqueurs et les parallèles entre hier et aujourd’hui sont frappants.

Beaucoup l’affirment, l’élection du 5 novembre prochain se jouera dans les porte-monnaie des votants. L’inflation a frappé de plein fouet les États-Unis et l’Amérique des petites gens souffre, tout comme celle de la classe-moyenne. Kamala Harris a un programme très social, promettant des crédits d’impôts, des aides financières pour les acquéreurs d’un premier bien immobilier, la construction de logements abordables ainsi que de nouvelles avancées de Medicare, entre autres. Elle affirme également souhaiter taxer davantage les plus riches et les multinationales. Le but de ce programme économique, jugé « communiste » par les Républicains, est de « créer une économie d’opportunités où chacun a une chance de rivaliser et une chance de réussir », comme l’a martelé la candidate lors de son discours de clôture de la convention du 22 août dernier. 

Certains des points clefs de son programme – finalement assez succinct pour le moment – rappellent des mesures prises par Franklin Delano Roosevelt à l’annonce du New Deal en 1933. Les États-Unis subissent alors de plein fouet la Grande Dépression, la pauvreté a atteint des niveaux records, les taux de chômage explosent – parfois même jusqu’à dépasser les 20% (source : Britannica) – et le président Hoover est dépassé. C’est le démocrate Roosevelt qui l’emporte donc aux élections de 1932 et il reste à la tête du pays jusqu’en 1945, prenant dès les premiers mois de sa présidence un virage radical et des décisions fortes pour remettre le pays sur les rails et sauver ce qui peut l’être. 

L’Amérique de Steinbeck

Dans Les Traqueurs, Charles Frazier met en scène un peintre missionné par le gouvernement pour insuffler l’esprit du New Deal à travers les Grandes Plaines et au-delà dans une Amérique vaste et dénuée des réseaux de communication que nous connaissons aujourd’hui. Val est donc chargé par la Work Progress Administration – l’un des nombreux organes établis par le Président pour appuyer la mise en place concrète de ses promesses – de réaliser une fresque qui ornera le bureau de poste. Celle-ci devra répandre la bonne parole et convaincre le peuple que la politique de Roosevelt concerne l’entièreté des États-Unis. « L’art pour le peuple », résume l’auteur. C’est dans le Wyoming qu’il envoie son narrateur, hébergé par des notables de la bourgade, dans un ranch où il détonne. De fil en aiguille, de rencontre en disparition, sa mission évolue et le narrateur est amené à sillonner plusieurs États, sur la piste d’une jeune femme mystérieuse qui à elle seule concentre plusieurs mythes...