Toujours cohérents, et donc rarement surprenants, les frères Dardenne nous offrent un nouveau portrait de laissés-pour-compte de la société, ici les mères adolescentes. Prix du scénario à Cannes, Jeunes mères est leur treizième long-métrage, mais seulement leur premier film-choral. Alors que le choix de cette forme aurait pu raconter la diversité de la maternité, il l’éclipse au profit d’intrigues secondaires convenues. Reste du film une promesse semi-tenue sur l’apprentissage de la parentalité.

Dans la maison maternelle qui leur apprend à être mères ou à confier leur enfant, quatre adolescentes d’origine modeste s’entraident avec bienveillance, malgré des trajectoires de vie fort compliquées. Ariane veut faire adopter son enfant contre l’avis de sa mère, ex-alcoolique, qui l’avait poussée à ne pas avorter. Abandonnée par son petit ami, Perla hésite à garder son fils. Orpheline, Jessica part à la recherche de sa mère biologique. Enfin, Julie et son compagnon Dylan, deux anciens drogués revenus de la rue, rêvent d’un appartement pour élever leur petite Mia.
Et si, malgré une écriture et un montage a priori complexes, la forme chorale était le choix de la facilité ? Mettre en scène une seule mère, issue d’une classe populaire, comportait des risques éthiques. Si elle choisissait de se défaire de ses droits parentaux, les frères Dardenne auraient pu être taxés de moralisateurs (être pauvre et avoir un enfant jeune, voilà qui n’est pas raisonnable). Si elle gardait l’enfant, ils auraient été trop candides. En donnant à voir quatre destins de mère, en s’attachant à chaque personnage avec la même attention, les réalisateurs anticipent les critiques et offrent une diversité de parcours qui échappe aux caricatures. Mais, à cause de cette même forme, ils oublient de traiter le lien entre enfant et mère.
“En donnant à voir quatre destins de mère, les réalisateurs anticipent les critiques et offrent une diversité de parcours qui échappe aux caricatures.”
Le tabou de l’enfant
Jeunes mères développe avec précision et réalisme les conséquences, parfois douloureuses, d’une naissance précoce : dilemme de l’adoption, absence possible du jeune père, désir d’émancipation contrarié par le statut de mineur… Les deux réalisateurs, également scénaristes du film, s’attèlent à créer des personnages féminins qui ne sont pas réduits à leur fonction de mère, mais qui doivent s’accommoder, tant bien que mal, à leur nouveau rôle. Chaque personnage cherche un chemin vers la stabilité. Plus que la maternité, c’est cette quête complexe qui soucie les frères Dardenne. Louable à première vue, le désir de ne pas simplifier leurs personnages les empêchent de questionner, de sonder en profondeur, la spécificité de l’amour (ou désamour) maternel.
Julie affirme vouloir sortir de l’addiction, et enfin savourer une vie meilleure, aux côtés de son petit ami et leur fille. La présence du bébé paraît presque anecdotique, il représente, au même titre que l’appartement tant rêvé, l’espoir d’un futur plus doux. On suppose que Julie aime sa fille, mais le film n’explore pas la nature de leur lien&...