Les Forteresses, sont les vies racontées et entremêlées de la mère et des deux tantes du metteur en scène Gurshad Shaheman. C’est le récit de trois vies, du témoignage d’une histoire et du courage nécessaire pour bâtir une vie d’espoir.
Une bulle intime
En entrant dans la salle, on hésite à s’installer sur les traditionnels gradins ou bien à se vautrer sur les nombreux tapis persans qui envahissent le plateau. Contre tout attente, Les Forteresses fait tomber le quatrième mur. Dès le départ, le ton est donné, nous devons nous installer confortablement pour ce voyage immobile de près de trois heures. La scénographie nous absorbe et nous installe in medias res au cœur du jeu. S’il peut y avoir une vague gêne de se sentir observé.es, les comédien.nes s’appliquent à prendre soin de nous. Iels déambulent sur scène et nous proposent boissons et collations. Nous sommes reçu.es comme des proches, comme des invité.es.
Nous sommes invité.es à les entendre, nous sommes invité.es dans ce monde de paroles mais pour bien le recevoir, ce doit être un moment intime pour nous aussi.
Comme nous savons qu’il y a au plateau les femmes qui ont vécues les histoires qui nous seront racontées, il n’est pas étonnant que cette entrée en matière se fasse avec beaucoup de soin. Nous allons recevoir une parole intime. Une parole qui a été offerte à Gurshad Shaheman par sa mère et ses tantes. Le metteur en scène a enregistré, retranscrit et écrit sur ces témoignages. Toujours est-il que nous bénéficions des fruits de la confiance, de l’amour, du moment qui a conduit ces femmes à se livrer. Nous sommes invité.es à les entendre, nous sommes invité.es dans ce monde de paroles mais pour bien le recevoir, ce doit être un moment intime pour nous aussi.
Les histoires de ces femmes sont racontées par trois conteuses Franco-Iranienne Guilda Chahverdi, Mina Kavani et Shady Nafar. Pour citer le metteur en scène « Chaque figure est donc scindée en deux : un corps réel et une voix fictionnelle ». Le travail d’articulation du texte met toujours le cap sur cette bulle d’inimité. Il y a une attention toute particulière au son : les actrices sont microtées, ce qui leur permet de presque chuchoter. S’ajoute à cette parole simple, peu théâtrale, une musique électro-acoustique composée et jouée en direct par Lucien Gaudion. Le récit nous est alors raconté dans un flot mélodieux, délicat et avec un langage et une adresse directe. Nous entrons dans les histoires portées par toutes ces figures féminines, sans chichi, en toute simplicité.
La langue maternelle
La langue française est le vaisseau de cette histoire, pourtant seule la mère de Gurshad Shaheman le comprend. Ces souvenirs racontés ont été vécus dans bien des langues, : le perse, le français, l’azéri, l’allemand… ...