Aux Déchargeurs, la compagnie Superlune met en scène Tandem, une émission de radio imaginaire où sont interviewés des compagnons de créatrices célèbres, un peu désemparés d’être des “hommes de” …
Catalogue des hommes
La journaliste aux manettes de cette émission, mixée en direct, a prévu de stimuler en faisant venir dans son émission le meilleur ennemi des créatrices : le compagnon artiste, celui qui éclipse souvent, sait s’effacer, parfois.
Comme souvent aux Déchargeurs, le plateau de théâtre se transforme en lieu hybride. Pour les spectateurs de Tandem ce sera un studio de radio où s’enregistre une émission type docufiction de France Culture de deuxième partie de soirée, du genre de celles qu’on écoute en se préparant à se coucher, l’esprit déjà un peu ailleurs. Mais la journaliste aux manettes de cette émission, mixée en direct, a prévu de stimuler en faisant venir dans son émission le meilleur ennemi des créatrices : le compagnon artiste, celui qui éclipse souvent, sait s’effacer, parfois.
Ecrit à partir d’archives réelles, le spectacle met en lumière et en son la rivalité et la solidarité des couples d’artistes, de manière ludique et didactique.
Sous nos yeux mi-agacés mi-amusés, le talentueux comédien Clément Carabédian incarne alors tour à tour un Gustave Malher psychorigide et jaloux de sa femme, la compositrice Clara Mahler, un Chopin névrotique se chamaillant avec Jules Sandeau et Alfred de Musset, un Richard Burton suffisamment imbibé pour se mélanger les pinceaux avec son traducteur (Louis Dulac, hilarant) mais dont le reste de sobriété lui sert à étriller Elizabeth Taylor avec une réjouissante méchanceté, mais aussi un Jacques Demy admiratif d’Agnès Varda et un Jean Tinguely dévoué à Niki de Saint-Phalle. Au micro de la journaliste, ils font preuve d’une mauvaise foi à toute épreuve, de masculinité toxique mais aussi, parfois, de tendresse et de soutien inconditionnel. Ecrit à partir d’archives réelles, le spectacle met ainsi en lumière et en son la rivalité et la solidarité des couples d’artistes, de manière ludique et didactique.
Prêcher des convaincues ?
L’adhésion du public repose ainsi sur les clins d’oeil humoristiques à la vie de ces femmes artistes (les propos de Jean Tiguely sont par exemple régulièrement ponctués -contestés ? – par les coups de fusil de Niki de Saint-Phalle en coulisse) et une véritable volonté d’expliquer des concepts importants (notamment ceux d’autrice, de plafond de verre, de masculinité toxique) sans ennuyer, même si Tandem n’échappe à une certaine lourdeur didactique que vient tempérer la variété des portraits joués et des archives choisies avec soin.
On aurait cependant aimé que la créativité déployée pour l’écriture (Josephine Caffin) le son (Louis Dulac) et la lumière (Mathilde Domarle) qui s’allient pour composer un ensemble composite très réussi d’archives sonores, de musique et d’éditos brillamment écrits, s’étende aussi à la question du format : puisque l’émission est en direct, pourquoi ne pas faire tomber le quatrième mur et faire entrer le public dans le dispositif ? Quitte à sortir du script et à intégrer des réactions contradictoires d’un public peut-être pas si acquis d’avance…
Une véritable volonté d’expliquer des concepts importants (notamment ceux d’autrice, de plafond de verre, de masculinité toxique) sans ennuyer.
Écriture Joséphine Chaffin, à partir d’archives
Mise en scène Clément Carabédian, Joséphine Chaffin
Création lumière Mathilde Domarle
Création sonore Louis Dulac
Vagabondage radiophonique – Salle Vicky Messica – jours de représentation : Mercredi, Jeudi, Vendredi, Samedi
Du 04/01/2023 au 28/01/2023 à 21H00