Présenté dans la section Orizzonti 2024 et grand gagnant de la compétition Final Cut l’année précédente à Venise (qui couronne le travail de jeunes réalisateurs en post-production), Carissa est le portrait délicat et puissant d’une jeune femme dans les montagnes africaines. Réalisé à quatre mains par les réalisateurs sud-africains Devon Delmar et Jason Jacobs, ce premier long-métrage à la beauté étrange et sensible captive le spectateur.

Une jeune fille, coincée dans les toilettes, pianote sur son téléphone. Au loin, une vieille femme hurle son prénom : « Carissa ! Carissa ! ». Cette dernière (Gretchen Ramsden) a la vingtaine et vit avec sa grand-mère (Wilhelmina Hesselman) à Wupperthal, une petite ville sud-africaine perchée dans les montagnes de Cederberg. Le jour, elle scrolle sur son téléphone, au grand dam de sa grand-mère qui voudrait la voir plus active. La nuit, elle rêve d’autres horizons avec Solly (Elton Landrew), son meilleur ami. Au loin, la présence fantomatique de son grand-père, Hendrick (Hendrik Kriel), disparu des années auparavant. Un peu moins loin, le roulis d’investisseurs qui souhaitent démolir les plantations de thé de sa famille pour en faire un espace lucratif. Que faire ? Carissa s’élance dans la montagne sur les traces de son grand-père afin de le convaincre d’entreprendre des démarches contre ces rapaces. Là, elle adopte le mode de vie traditionnel de la communauté qu’elle rencontre. Ses mains apprennent à manier la serpe et sa mémoire à reconnaître l’histoire de ses ancêtres. Elle semble dès lors trouver dans l’apprentissage de cette chorégraphie millénaire une forme d’apaisement.

Si le soubassement du récit semble dans un premier temps convenu – le malaise de la jeunesse et le retour aux sources étant des thèmes topiques – le traitement de l’intrigue et la manière qu’a la mise en scène de concentrer le conflit dans le visage fermé de Carissa le distinguent. Jamais l’alcoolisme de son père ne sera évoqué frontalement. L’ombre de cet homme qui somnole dans le poulailler apparaît juste entre deux images, et la douleur de cette présence est tue. Carissa est donc un film qui ne...