ITOUA Princia New Homelands, Souvenir d’espaces africains 2016, Photographie numérique, 34 x 51 cm
ITOUA Princia
New Homelands, Souvenir d’espaces africains
2016, Photographie numérique, 34 x 51 cm

Le Beffroi de la ville de Montrouge accueille jusqu’au 23 mai la 63e édition du Salon d’art contemporain, où sont exposées cette année les œuvres de 52 artistes. Ami Barak et Marie Gautier, directeurs artistiques du Salon proposent quatre thématiques pour orienter le visiteur: La boîte à outils, Pop team epic, Le futur du passé,  Avec ou contre nature.

Affiche-Montrouge-2018
Le Salon de Montrouge, créé en 1955, se donne pour mission de soutenir la jeune création contemporaine. Sont ainsi sélectionnés des artistes émergeants de toutes nationalités, qui ont  tous à cœur de dévoiler leurs univers, de nous faire rentrer, en somme, dans leurs « boîte à outils ». Les œuvres faisant montre d’une  technique et  d’une esthétique maîtrisées sont nombreuses, et l’on peut ainsi apprécier le travail accompli par les artistes pour se forger une identité visuelle. Mais surtout, elles font appel à la poésie et l’humour du spectateur, loin des projets trop conceptuels et hermétiques, catégorie finalement peu représentée. Lors du vernissage plusieurs prix[1] ont été décernés, ils permettront aux artistes de poursuivre leurs travaux, en bénéficiant d’aides financières ou matérielles.

Révéler des espaces insoupçonnés

Parmi les œuvres marquantes du Salon, plusieurs réenchantent le regard en détournant les expériences quotidiennes et en y ouvrant des espaces insoupçonnés.

COETTE Célia Porte-serpentins 2017, Serpentins, fers à béton, ciment, 213 x 52 x 52 cm
COETTE Célia
Porte-serpentins
2017, Serpentins, fers à béton, ciment, 213 x 52 x 52 cm

L’on pense ainsi à Samira Ahmadi Ghotbi (Prix de l’association Orange Rouge) qui dans La Bataille de l’escargot, fait dialoguer image et réalité, passé et présent : découvrant un jour chez elle une reproduction d’une miniature iranienne illustrant la construction d’un palais grignotée par un escargot, l’artiste prend cette intrusion au mot et peint sur un mur la riposte des ouvriers qui se défendent contre l’escargot vorace.

Parmi les œuvres marquantes du Salon, plusieurs réenchantent le regard en détournant les expériences quotidiennes et en y ouvrant des espaces insoupçonnés.

L’Histoire de l’escargot voisine avec l’espace occupé par les œuvres de Princia Itoua Dickelet (Prix des Ateliers Médicis). Au  cœur de son projet et de son espace d’exposition, on retrouve le récit de la vie de Kanye Mendel raconté dans un livre. Ce personnage créé par l’artiste est un peu son double. Le visiteur est invité à s’asseoir pour feuilleter l’ouvrage, et se laisser ensuite immerger par la série de photographies où l’artiste projette la sensation d’infini de l’espace africain dans des paysages français. En face, l’installation de Romuald Dumas-Jandolo séduit par ses couleurs chatoyantes et son évocation du monde du spectacle, mais souvent les objets se teintent d’une note plus tragique. On pourrait citer aussi la forêt Presque sauvage de Célia Coëtte, le réverbère poète de Baptiste César, les photographies de Baptiste Rabichon (lauréat d’une résidence à Moly-Sabata) mêlant technique argentique et numérique, le cube en miroir ouvrant un espace imaginaire et infini (par Roland Burkart, lauréat du Prix Kristal) et le Plancher flottant de Clémentine Carsberg, qui dissimule un papier peint au charme désuet.

GRANIER Antoine Simulacron (capture) 2016, Vidéo HD, Dimensions variables
GRANIER Antoine
Simulacron (capture)
2016, Vidéo HD, Dimensions variables

Les vidéos sont également très présentes et proposent des expériences visuelles immersives, comme les personnages drôlatiques d’Antoine Granier ou les situations variées réalisées et interprétées intégralement par Ariane Loze (Prix du Conseil Départemental des Hauts-de-Seine). On rentre littéralement dans la vidéo didactique de Pauline Julier, abritée dans un rocher, qui raconte la découverte en Chine d’une forêt vieille de 300 millions d’années, puis la reconstitution en image du paysage disparu. Enfin, on ne peut pas manquer les vidéos de Mali Arun, au début de l’exposition, qui ont valu à l’artiste le Grand Prix du Salon. On retiendra particulièrement Saliunt Venae (battements de cœur), où l’on assiste à la traversée d’un brasier incandescent par des jeunes lors de la fête de la Saint Jean en Alsace. Les ombres noires se découpent de manière saisissante sur les flammes blondes, toutes semblent se mouvoir au son d’un battement de cœur.

Enfin, une soirée de performances organisée en partenariat avec le Palais de Tokyo aura lieu le 17 mai, avec des artistes spécialement invités pour l’occasion, dont le collectif YOURS qui réalisera La Performance des rêves pour chaque visiteur acceptant de voir son rêve le plus cher s’accomplir.

Dans l’ensemble, donc,  des productions variées et plus accessibles pour le public peut être que dans l’édition passée. On découvrira ainsi dans un espace un tant soit peu labyrinthique des œuvres dont la poésie, la narration ou la réalisation technique pourront toucher le spectateur. Ce sont autant de portes d’entrées pour pénétrer dans des installations parfois déroutantes, mais qui sont en fait souvent plus simples qu’il n’y paraît, car elles font appel à la sensation directe et à l’imagination.

Agnès Gué

[1]Voir le site www.salondemontrouge.com pour la  liste exhaustive des prix et des lauréats.